La Mandragore
D’après Machiavel
Théâtre de La Lucarne
Mise en scène : Serge Vinson
En raison de la forme vaguement humaine de sa racine, la mandragore a été associée depuis l'antiquité à des croyances et des rituels magiques. La racine de mandragore était censée procurer à son possesseur prospérité prodigieuse, abondance de biens et surtout fécondité.
C'est en s'appuyant sur cette mythologie, très vivante encore à la sortie du moyen âge, que Nicolas Machiavel construit son intrigue.
Dans la Florence du XVIe siècle, un beau jeune homme rêve de conquérir une femme mariée à un professeur vaniteux et benêt.
Il trouve quelques comparses pour monter un piège insensé qui va l'amener dans le lit de sa bien-aimée.
Pour en arriver là, les personnages sympathiques de la pièce, Liguria et Callimaco, n'auront de cesse de manipuler en s'appuyant sur le désir d'enfant du mari stupide, sur la cupidité d'un moine truculent, sur la bêtise d'une mère prête à tout pour que sa fille ne soit pas stérile et sur le respect inconditionnel de la religion de la belle Lucrezia qui est quand même la seule à exprimer quelques résistances à coucher avec un inconnu qui, de surcroît, ne survivra pas à leur accouplement puisqu'il aura absorbé, en la pénétrant, tout le poison contenu dans la tisane de mandragore bue par la jeune femme avant de s'offrir à lui.
L'intelligence et l'amour véritable sont du côté des manipulateurs ; la bêtise, l'ignominie et la faiblesse sont du côté des manipulés.
Même s'il s'agit d'une farce, on retrouve donc les ressorts de la pensée philosophique et politique basée sur l'idée que pour parvenir à ses fins il faut savoir comprendre et utiliser les sentiments humains, y compris les plus vils.
Dès les premières minutes de la pièce, on est dans le rythme !
Callimaco – Geoffroy Poncelet – est juste, énergique et sympathique. Il le restera jusqu'à la fin du spectacle.
Sira – Claudine Deraedt –joue parfaitement la servante dévouée. On sent qu'on va bien s'amuser et la suite nous le prouve largement.
Liguria est parfaite de rouerie et de malignité, et on retrouve bien le jeu de Claudette Samsoën qui nous plaît tant.
Nicia est un sommet de bêtise affligeante. Jean Truchaud est au top avec une façon de parler qui apporte une touche très comique au personnage.
Lucrezia est belle à croquer. L'accent brésilien d’Adriana Arnaud apporte une belle couleur au personnage. On comprend bien le tourment de Callimaco ... La petite pantomime du début est un régal.
Le frère Timothée est le pire de tous et le plus drôle. On y croit. On a un "vrai" moine sorti du moyen âge sur scène. Et on s'étonne que Machiavel ait eu des problèmes avec le pouvoir ! Bravo Frédéric Sol. Quand je pense qu'on a joué ensemble dans l'Oiseau Vert il y a 35 ans !
Et la prouesse de cette mise en scène c'est que même les plus petits rôles sont justes et drôles : Sostrata la mère – Isabelle Jacquet – est odieuse et la femme voilée stérile, inquiétante – Magali Gautier.
Bravo Serge pour ce travail de grande qualité, sans prétention déplacée, mais rigoureux et précis dans la mise en scène et la direction d'acteurs.
Galerie Photos : LA MANDRAGORE De Machiavel
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2 commentaires
Commentaire de: Isabelle Visiteur
Commentaire de: freds Membre
Merci à toi Pierre pour cet article élogieux sur le rôle du moine pourtant si peu recommandable !
Comme pour “L’Oiseau Vert", tu auras vu que je me suis laissé pousser cheveux et barbe, impliqué à fond dans le rôle comme d’habitude.
Tu connais notre devise : le plaisir du spectateur avant tout.
Merci à David pour les superbes photos !
Merci Pierre Lemoine pour cet article et merci aussi à David pour les superbes photos que nous apprécions beaucoup.
Nous avons joué comme toujours avec beaucoup de plaisir devant le public du festival et nous espérons lui avoir fait passer un moment agréable.