LA MÉGÈRE APPRIVOISÉE
D'après William Shakespeare
Compagnie Les Têtes de Bois
Mise en scène : Medhi Benabdelouhab
Disons-le franchement, toute cette affaire de Petruchio et de Catarina, avec ses remontrances et ses extravagances verbales, doit fatiguer l'homme et offenser la femme moderne.
Mais notre époque, pour le meilleur et pour le pire, ne voit plus la femme ni son voeu d'obéissance dans le mariage. Notre époque n'admet peut-être plus la chevalerie des Cours d'amour, ni l'idéalisation de la femme dont le culte de Marie répandait la noble coutume dans les Cours et les tournois.
Les deux intrigues de cette pièce sont si bien liées que l'on ne peut guère les séparer sans faire affront à l'art qui les unit.
En fait LA MÉGÈRE entraîne le spectateur à s'interroger sur les comportements humains. A lui d'essayer de les comprendre et de les apprécier selon sa propre logique, car ici l'auteur ne lui donne pas les clés.
Elle force généralement Petruchio à donner exagérément de la voix, à "gueuler" comme un butor. Et pourtant cette enveloppe de brute cache une délicatesse que le rôle est tenu d'exprimer et qui plaît. Chargé du dressage de la Mégère, il s'y consacre avec toute la sévérité requise. Mais lors même qu'il bat la campagne, terrifiant ses gens et son tailleur pour l'édification de Catarina, il ne lui parle jamais que d'une manière courtoise et modérée, ironique certes par l'excès de courtoisie, mais délicate et raffinée.
L'acteur qui joue Petruchio a su rendre cette délicatesse sous-jacente et a contribué à la réussite de la pièce. Quant à Catarina, reconnaissons, sous son masque agressif, un caractère de femme selon le coeur de Shakespeare, femme éminemment mariable et bien disposée envers la conjugalité. Et y a-t-il plus joli dénouement dans tout Shakespeare que la compréhension réciproque entre l'homme et la femme unis par le mariage?
LA MÉGÈRE APPRIVOISÉE, mise en scène par Medhi Benabdelouab, trouve ici un écho particulièrement favorable. Ces sept comédiens de grand talent maîtrisant parfaitement le texte ont enthousiasmé le public de Coye-la-forêt.
Décors, costumes, lumières, parfaitement réglés ont contribué à faire de ce spectacle haut en couleurs, un moment de grâce, de rêve et de beauté.
Et que dire de Adil Kaced, le génial musicien, capable d'accompagner toutes les scènes de la pièce avec ses différents instruments, utilisant souvent sa voix ?
Oui ce samedi 17 mai restera dans nos mémoires comme un grand moment de théâtre. Ce théâtre que nous aimons.
Ah, Shakespeare! Tu nous feras toujours toucher du doigt la profondeur de l'âme humaine.
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