OH, BOY !
D'après Marie-Aude Murail
Par le Théâtre du Phare
Avec Guillaume Fafiotte
Mise en scène : Olivier Letellier
Un décor de brocante : armoire passe-partout et chaise d'enfant. Et puis un jeune homme avenant qui va nous raconter son histoire, une histoire banale comme toutes les histoires mais qui deviennent des petits bijoux quand on sait les raconter et les faire vivre.
Dès le début, l'empathie du jeune comédien, Guillaume Fafiotte, nous séduit et nous savons que nous sommes prêts à le suivre dans cette aventure imprévue qui va d'abord le submerger avant de l'engager et d'en faire un véritable tuteur, responsable d'une demi-soeur et de deux demi-frères.
Oh, boy ! Ça veut rien dire ! Détrompez-vous. C'est le tempo de cette pièce qui marque l'évolution progressive de Barthélémy Morlevent.
Oh, boy ! C'est bien une pièce d'aujourd'hui, drôle et émouvante, portée par un jeune acteur dont on peut souhaiter le plus grand avenir.
GALERIE PHOTOS : OH, BOY ! D’après Marie-Aude Murail
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Oui, le comédien est touchant de fraîcheur et d’ingénuité. Il incarne le personnage de Barthélémy qui nous apparaît, du moins au début, comme un jeune adulte ordinaire, plutôt insouciant comme on l’est à son âge, vivant sa vie, bien dans ses baskets… et voilà qu’il lui tombe toute une série de catastrophes sur le dos. Chaque fois, pour dire son étonnement, son désarroi, son incrédulité, il commence par s’écrier “Oh boy !” comme accablé … et puis il se ressaisit, regarde le problème en face et décide de l’affronter (et ce n’est pas rien, c’est lourd comme une armoire à prendre sur son dos) . “Oh boy !", c’est le courage ordinaire, l’héroïsme quotidien, le sacrifice sans fanfare.
La mise en scène est extrêmement inventive. Les sentiments sont exprimés, traduits, transcrits par des images physiques : le poids de l’existence malheureuse par l’armoire qu’il faut manipuler, déplacer et supporter sur son dos, le bonheur qui jaillit soudain par une pluie de balles de ping-pong qui tombent du ciel et rebondissent joyeusement sur la scène.
Pour rendre présents les autres personnages de la fratrie, on aurait pu nous proposer de grands portraits photographiques, celui de Venise, la blondinette toute bouclée et celui de Siméon, le maigrichon binoclard. Mais non ! les personnages absents sont évoqués par des objets qui les représentent : un canard culbuto et on imagine la petite Morgane, un gros bouquin et c’est le jeune frère surdoué, une poupée Barbie, on sait que c’est la juge des tutelles au téléphone…
Bien loin de détruire notre imaginaire comme l’auraient fait des photos (forcément réductrices), ces multiples inventions, à la fois amusantes et suggestives, le nourrissent et donnent de l’épaisseur aux personnages qui sont d’autant plus vivants que nous les voyons par les yeux de Barthélémy, car ce sont ses propres sentiments qui s’expriment ainsi à travers ces objets, comme si c’était lui qui les avait choisis.
Sans jamais tomber dans le pathos, avec beaucoup de tendresse et juste ce qu’il faut d’humour, avec délicatesse et sans esbroufe, il y a, dans cette mise en scène et dans le jeu de l’acteur, beaucoup d’intelligence et de sensibilité.