L’Affaire Calas
de Julien Luneau d’après le Traité sur la tolérance de Voltaire
Compagnie Grand Théâtre
Mise en scène d'Étienne Luneau
La Compagnie Grand Théâtre choisit de mettre en scène l’un des combats les plus célèbres de Voltaire contre le fanatisme et l’intolérance : L’Affaire Calas.
En l’an 1762, à Toulouse, un père de famille de religion protestante — Jean Calas — est accusé sans preuve du meurtre de son fils et condamné à mort pour l’exemple. En effet, l’affaire est pilotée par l’Église catholique et ses représentants désireux d’éradiquer le protestantisme bien implanté dans le sud de la France.
Julien Luneau, qui s’appuie sur des textes d’archives, nous fait revivre les circonstances de cette tragédie : manipulations, faux témoignages, procès, châtiment, réhabilitation trois ans plus tard grâce au combat de Voltaire dont les lettres et pamphlets ont volé jusqu’à Frédéric II de Prusse avant de joncher la scène du Grand Théâtre.
La pièce s’ouvre sur un empilement de chaises, symbole des idées bien assises qu’il faudra détruire et sur trois comédiens (Hugues de La Salle, Malvina Morisseau, Lucas Henaff) encapuchonnés dans leurs cagoules blanches et chantant les louanges à Dieu en latin. Ils vont interpréter avec brio une multitude de rôles sans jamais brouiller les repères temporels ou spatiaux.
Lucas Henaff endosse tour à tour le rôle d’enquêteur en long pardessus gris puis celui du juge, le Sieur Capitoul ( Toulouse oblige!), partial et fanatique.
Hugues de La Salle circule entre les chaises avec dextérité avant de se hisser sur l’une d’elles pour mieux s’approcher de la transcendance, sans doute.
Quant à Malvina Morisseau, elle maîtrise avec aisance ses rôles de narratrice, mère, épouse, victime (Jean Calas) clamant son innocence sur la roue...
La tragédie est traitée en comédie : grotesque, caricature, accessoires ridicules, accents étrangers... Le rire fait oublier l’horreur.
Le jugement du Parlement de Toulouse sera cassé à Paris le 9 mars 1765. Mais le combat contre le fanatisme et l’injustice n’est jamais terminé. Un extrait de la belle Prière à Dieu, qui prêche la tolérance et la fraternité fait vibrer les coeurs à l’unisson. Poutant la chanson révolutionnaire «Ça ira...» qui lui succède, interprétée par Edith Piaf, ne résonne-t-elle pas comme une mise en garde ? Garder sa conscience en éveil est toujours d’actualité.
Julien Luneau a réussi la gageure de mettre en scène des réflexions philosophiques inspirées du Traité sur la Tolérance. Le public a apprécié cette création engagée, parfaitement documentée, portée par des acteurs de talent.
Bravo à tous !
L'AFFAIRE CALAS de Julien Luneau
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