André et Dorine (2)
Compagnie Kulunka Teatro (Espagne)
Mise scène : Iñaki Rikarte
Un petit salon simple mais coquet, sur les murs les photos des moments intenses de leur vie, une étagère où reposent des livres, un violoncelle, voilà le décor dans lequel évoluent André et Dorine qui entrent peu à peu dans l’hiver de leur vie.
« Elle » et « Lui » semblent ne plus se conjuguer avec « Nous ». Le couple ne se supporte plus. Le bruit de la machine à écrire d’André agace profondément Dorine, les accords du violoncelle exaspèrent André. La seule visite qu’ils reçoivent est celle de leur fils unique, un peu las des écrits de son père et des tricots pourtant confectionnés avec amour par sa mère.
Mais ce « Toi et Moi » qui longtemps les avait unis dans la tendresse du « Nous » revient peu à peu lorsque l’impitoyable maladie d’Alzheimer frappe Dorine. Alors leur complicité du meilleur revient avec le pire. André est là, présent pour lui tenir la main, la rassurer de sa présence en ce moment délicat.
A l’aide des photos et comme pour oublier les moments horribles qu’il vit André revisite leur jeunesse. Dorine en fait de même dans ses quelques éclairs de lucidité.
Point de texte dans cette comédie mais une gestuelle remarquable dans laquelle évoluent les trois jeunes acteurs masqués interprétant plusieurs rôles. Outre les trois principaux protagonistes, qu’ils incarnent dans la vieillesse et aussi dans la jeunesse, ils sont également médecin, livreur, aide-soignante, patient de la salle d’attente du cabinet médical.
Une musique enjouée ponctue le passé heureux d’André et de Dorine. Des claquements bruyants de porte témoignent de leurs angoisses et de leur incapacité émotionnelle à gérer les situations douloureuses. Quelques notes semblent égrener le temps qui passe.
Les masques expressifs portés par les acteurs sont d’une splendide plastique.
Humour, tendresse, cocasse de certaines situations nous font rire : les maladresses d’André au printemps de sa vie, son désordre de célibataire mais aussi le patient de la salle d’attente qui ne cesse de chasser les puces qui l’envahissent, le livreur qui attend un pourboire et se voit gratifier d’un livre dédicacé…
On rit jaune lorsque Dorine perd sa culotte, revêt son manteau à l’envers, enfile ses chaussettes en guise de gants ou sort des lieux d’aisance après s’être amusée avec le papier toilette.
Mais la larme vous vient peu à peu et vous sortez le mouchoir lorsque Dorine se repose une dernière fois sur l’épaule d’André dans une tendresse émouvante avant que de disparaître à jamais, la violoncelliste reposant avec son archet dans son écrin de cuir noir. Puis viendra le tour d’André…
Lorsque le fils videra la maison il retrouvera le dernier écrit de son père, témoignage de la fin de vie du couple.
Un spectacle exceptionnel, débordant d’émotions et très touchant. FÉLICITATIONS à cette troupe espagnole qui l’a interprété avec brio.
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