Vote utile, mais utile à quoi ?
Le 4 mai 2017, je signais une tribune libre dans coye29 que j'intitulais "Je déteste Macron", dans laquelle j'écrivais (pardon de m'auto-citer, mais je ne formulerais pas les choses autrement aujourd'hui) : "Macron, c'est le libéralisme brutal, arrogant, insensible, c'est la loi-travail contre laquelle on a manifesté pendant des mois, c'est la dérégulation massive, la perte des acquis sociaux les uns après les autres, c'est le triomphe des traités de libre-échange, le rouleau compresseur de la mondialisation, c'est-à-dire la toute puissance de la finance et des multinationales, l'écrasement des peuples sous l'austérité pour la plus grande prospérité des actionnaires, Macron est un ennemi de classe. Il suffit de regarder la composition sociologique des votes après le premier tour : majoritairement, qui vote Macron ? Les classes aisées et supérieures, celles qui n'ont pas de problème et qui ne se trouvent pas trop mal dans le monde tel qui est. Macron, c'est la poursuite du modèle actuel, c'est l'épuisement des ressources de la planète et le désastre écologique annoncé. Avec Macron, on va droit dans le mur et on y va vite." Je pourrais ajouter : Macron, c'est le report de la retraite à 65 ans, à un âge où la moitié de la population active est éloignée du travail, soit en maladie soit au chômage, quand les jeunes ont tant de mal à entrer sur le marché du travail. Macron, c'est les mensonges droit dans les yeux, la poursuite de la suppression des lits à l'hôpital, malgré la pandémie. C'est la destruction programmée des services publics, dépecés de façon systématique et vendus au secteur privé (après l'hôpital, l'énergie, les transports, l'école, l'université...). C'est la violence policière à l'encontre des manifestants. C'est le creusement des inégalités. C'est tout ça et bien d'autres choses encore, notamment la volonté de relancer l'économie sans limite dans l'ignorance absolue des problèmes écologiques et de la crise climatique. Que les gens de droite se rallient à Macron et votent pour lui, ça paraît logique. Mais les gens de gauche ? J'en connais qui avaient voté Macron dès le premier tour en arguant que c'était un "vote utile". Ils ont pu se tromper il y a cinq ans, mais aujourd'hui ?
Pour les "vrais" gens de gauche se pose la question du vote au premier tour dimanche prochain. Il ne faut pas que les voix s'éparpillent et donc, de fait, se perdent sur les différents candidats dits de gauche : ils sont six à se présenter et le risque est fort de retrouver pour la troisième fois dans notre histoire un.e Le Pen au deuxième tour. Le seul candidat susceptible de nous éviter ça, tout le monde le sait aujourd'hui, c'est Jean-Luc Mélenchon, quelles que soient les réticences que le personnage inspire. Oui il s'emporte, il vitupère, aux yeux de certains il apparaît comme extrémiste, dictateur en puissance, tout ce que vous voudrez... N'empêche qu'il est le seul à pouvoir nous éviter un retour du même scénario, avec les mêmes personnages dans cette mauvaise pièce où la droite et l'extrême droite font semblant de se confronter alors qu'elles sont fondamentalement d'accord sur tellement de points.
Pour nous éviter cette répétition désespérante, il n'y a pas d'autre solution que voter Mélenchon, pas pour que Mélenchon gagne, il ne faut pas rêver ! (ou cauchemarder, c'est selon), mais pour qu'au moins la gauche soit présente, qu'on ait un vrai débat entre les deux tours, pour qu'on cesse de penser qu'il n'y a pas d'autre voie possible que celle du libéralisme économique et de la casse sociale, pour que les vraies questions soient posées, les vrais clivages sur notre vision du monde. Au lieu du ressassement des thèmes identitaires et racistes qui n'a d'autre but que de détourner la colère sociale des vrais sujets, il faut qu'on puisse entendre la voix de ceux qui veulent mettre l'économie au service de l'humain et non l'inverse, organiser une planification écologique afin de limiter les catastrophes à venir, réduire les inégalités au lieu de les creuser, renforcer les services publics au profit de tous.
C'est très simple, faire en sorte que la gauche soit présente au deuxième tour, c'est empêcher que l'extrême-droite y soit. Il faut voter Mélechon tout simplement pour que le débat ait lieu et que la démocratie retrouve un peu de vitalité.
Je recommande chaudement la lecture de cette tribune que je trouve convaincante : https://www.ceseramelenchon.com/
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11 commentaires
Commentaire de: bernard_durand Membre
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Effectivement il est difficile de rêver aujourd’hui. Le problème est juste de savoir qui on préfère voir figurer au deuxième tour : il n’y a pas trente-six possibilités, c’est soit Macron-Le Pen, soit Macron-Mélenchon. Quel que soit le duel, rien ne vous empêchera de voter Macron à ce moment-là. Une chose est sûre, c’est que si Marine Le Pen est éliminée au premier tour, d’abord on n’aura plus à craindre sa victoire (car il n’est pas complètement exclus qu’elle l’emporte) et ensuite, quoi qu’il en soit, le débat politique sera quand même plus intéressant et les questions essentielles, concernant notamment l’urgence climatique et les injustices sociales (en d’autres termes la lutte des classes), ne pourront pas être esquivées.
Car si l’opposition à Macron (dont toute la politique est clairement de droite), ce n’est pas la gauche , mais l’extrême-droite, voilà qui rétrécit singulièrement le champ de la controverse.
Juste une remarque encore. Vous écrivez : Macron, "au moins on le connait et il faut se mobiliser contre." On a vu ce que ça donne : des milliers d’arrestations, des yeux crevés et des mains arrachées. Et vous ajoutez : "mais avec Mélenchon, dont certes une partie du programme est intéressante, ce sera un autre scénario qui sera peut-être pire pour notre pays". J’ai envie de vous retourner votre propos : il faudra se mobiliser ! et j’ose espérer que Mélenchon n’utilisera pas les LBD contre la foule.
En somme, vous avez peur de l’inconnu, personnellement je redoute ce que désormais nous ne connaissons que trop bien.
Commentaire de: LEBRET Claude Visiteur
Les propos caricaturaux sur Macron ne servent pas le débat. Que Macron soit du centre m’indiffère ; ce qui me parait important, entre autres, c’est que l’Allocation Adulte Handicapé ait été revalorisée, que les Handicapés puisent voter, que les classes primaires des zones en difficulté puissent n’avoir que 12 élèves et que l’impôt sur les multinationales soient adoptées au niveau international. Ces mesures pourraient être considérées de gauche. Dimanche, je ne voterai pas pour un populiste mais pour le Parti Socialiste afin qu’il puisse atteindre les 5 % et donc bénéficier du remboursement de la campagne (même si j’aurai préféré que le PS et les Ecologistes fassent campagne ensemble). Il ne faut pas oublier ce qu’a fait la gauche depuis 40 ans car il faut rappeler que les 2/3 des Français bénéficient de la redistribution même si le combat doit continuer en évitant le corporatisme et en misant sur la solidarité, par exemple, en supprimant l’héritage ou en taxant beaucoup plus fortement les successions.
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Personnellement, si ça s’était présenté comme ça, j’aurais voté – de mauvais cœur mais j’aurais voté – pour Anne Hidalgo, pour faire barrage à Le Pen. Mais voilà, ça se présente autrement. À la primaire populaire, j’ai voté pour Christiane Taubira. L’unité ne s’est pas faite sur son nom. Donc, comme beaucoup de personnalités modérées et raisonnables, comme Christiane Taubira elle-même, je me rabats sur Jean-Luc Mélenchon parce qu’il y a danger pour la démocratie et urgence pour le climat.
Commentaire de: LEBRET Claude Visiteur
je pense qu’il ne faut pas se laisser guider par les sondages et voter pour des partis de gouvernement. qui puissent réfléchir et agir pour le plus grand nombre dans des domaines si différents que l’éducation, la défense nationale ou encore l’environnement… Il na faut pas oublier que, dans les prochaines années , les électeurs de gauche risquent de regretter qu’il n’y ait plus de Parti Socialiste.
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Il ne faut pas pas trop répéter ce que disent les médias. Cette expression "partis de gouvernement" n’a aucun sens. Avant 2017, En Marche n’était pas un parti de gouvernement, et même ce n’était pas un parti du tout !
Dans quelques années ce qu’on regrettera, à gauche comme à droite, c’est de ne pas avoir pris l’écologie au sérieux.
Commentaire de: Durand Bernard Visiteur
A la veille du scrutin et vu que Marine Le Pen a augmenté ses chances d’être retenue pour le second tour et plus même d’être élue, je rejoins votre analyse : il faut mieux un second tour Macron-Mélenchon qui aura le mérite de permettre un vrai débat même si dans cette hypothèse Macron a toutes ses chances. Quant à l’hypothèse Hidalgo, c’est vraiment râpé pour elle et elle n’obtiendra pas les 5%, contrairement à ce que souhaiterait C Lebret.
le PS paie une absence de réflexion et d’ancrage populaire qui remonte au congrès de Rennes. A l’époque, on était un certain nombre à prédire la catastrophe qui s’en suivrait. L’habileté tactique de F Hollande a fait reculer cette échéance, mais tout est à reconstruire comme quand Deferre avait été candidat en 1969.
Commentaire de: Marie Louise Membre
Et voilà ! Jacqueline avait raison, S’il y avait eu qqs voix supplémentaires pour choisir Mélenchon au lieu de Hidalgo, Jadot ou Rousselle, ns aurions la possibilité d’entendre une voix de gauche capable de l’emporter dans ce dernier face à face.
Et si ces 3 candidats avaient eu le courage d’oublier leurs ego et de se désister…
Coup de chapeau à Christiane Taubira.
Commentaire de: LEBRET Claude Visiteur
Marie-Louise, Je pense tout à fait l’inverse. Reprocher à ROUSEL d’avoir fait battre MELENCHON c’est inconcevable quand on se souvient que MELENCHON a trahi le PC en partant seul à la présidentielle. De plus, comme le souligne B. DURAND, en face de MACRON, MELENCHON aurait perdu au second tour; c’est pourquoi, je pense que les électeurs de LFI ont pris un grand risque en éliminant de la carte politique les partis comme le PC, le PS ou encore les Verts. Dimanche pour le 2ème tour, je voterai MACRON. J’espère que ceux qui auraient dû voter PC, PS ou Vert feront de même car Le Front National aura les voix de Reconquète et d’une partie des de La France Insoumise, mais la partie est largement gagnable car les salariés du privé (surtout ceux des petites entreprises qui auront beaucoup à perdre avec le Front National) devraient se mobiliser. Ensuite, il faudra analyser pourquoi la gauche a perdu son crédit auprès du monde ouvrier.
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Nous sommes bien d’accord, Mélenchon aurait perdu au deuxième tour ! mais du moins si on avait fait barrage à Le Pen dès le premier tour, le deuxième tour aurait été intéressant au lieu d’être anxiogène et effectivement dangereux. Depuis le début je n’ai rien dit d’autre.
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Il s’agissait de faire barrage à Le Pen, là, ponctuellement sur les élections présidentielles, pas "d’éliminer de la carte" les autres partis situés à gauche.
Le PS et le PC se sont éliminés tout seuls, ils étaient déjà bien faibles avant même que la campagne soit lancée et ils ont peut-être fini de s’autodétruire en ne comprenant pas l’enjeu de ce premier tour.
Il faudrait savoir faire son autocritique et cesser d’accuser les autres et de tout mettre sur le dos de Mélenchon. Le premier responsable de l’effondrement du PS, c’est le PS lui-même. C’est François Hollande, lui président, qui n’a pas respecté ses promesses de campagne et a adopté une politique néolibérale (c’est quand même lui qui a parrainé Macron, non ?). Qu’on se souvienne également de la façon dont Benoît Hamon, candidat désigné par les primaires de gauche en 2017, a été torpillé par son propre parti, par Manuel Valls notamment : or précisément en désignant Benoît Hamon, les gens de gauche demandaient un peu de fermeté et de radicalité. Il ne faut donc pas s’étonner qu’un parti pratiquant la mollesse, le mensonge et la déloyauté soit déserté par les électeurs.
Alors il faut arrêter ! Mélenchon a fait son boulot, pas les socialistes.
Lorsque l’on vote pour quelqu’un à la présidentielle, c’est que l’on espère ou que l’on rêve de le voir président. Mais j’ai beau m’y essayer, je ne peux pas faire un tel rêve avec Mélenchon. Certes le scénario Macron ne me satisfait pas et je partage la quasi -totalité de votre analyse , mais au moins on le connait et il faut se mobiliser contre, mais avec Mélenchon, dont certes une partie du programme est intéressante, ce sera un autre scénario qui sera peut-être pire pour notre pays : il suffit de voir comment il a traité les communistes ; je suis européen et je lui laisse son alliance bolivarienne, son aveuglement devant Poutine et la République c’est moi.
La seule chose importante, c’est de repenser les fondamentaux qu’il faut aujourd’hui pour une politique de gauche, pas de faire un pari sur un homme certes brillant, mais peu fiable et loyal.