"Roulez mieux, roulez vieux !"
Burlesque, déjanté, irrésistible, désopilant, nos deux comédiens, Valérie LARROQUE et Christophe NOEL, de la Compagnie du Détour, nous offrent un spectacle éblouissant de 1h10. Le spectateur baigne, avec délectation, dans un bon bain de rire.
Dans cette pièce au titre pompeux de « MODESTES PROPOSITIONS POUR REMEDIER A LA TROP FORTE CROISSANCE DE LA POPULATION MONDIALE » nous sommes en présence de deux dignes successeurs de Jacques TATI et de Buster KEATON.
Un démographe et son assistante nous donnent une conférence sur l’évolution de la population dans le monde en ce début du troisième millénaire. Sujet grave s’il en est mais récurrent car déjà traité en leur temps par d’illustres penseurs dont PLATON, SWIFT, DARWIN, MALTHUS. Toutes leurs théories réunies par une subtile alchimie deviennent un fabuleux mélange de bêtises, voire d’absurdités. Proposition nº 1 : nourrir les plus riches avec des rôtis d’enfants pauvres; Proposition nº 2 : liquéfier les vieilles dames pour les transformer en carburant ("Roulez mieux, roulez vieux" ) ; Proposition nº 3 : automatiser les ouvriers.
Agnès LARROQUE dans une mise scène, sans décor, met l’accent sur le jeu loufoque mais intelligent et surtout très physique des acteurs.
Il suffit de les voir pour avoir envie de rire, elle, en tailleur rouge qui lui moule le corps, attifée
d’une grosse tresse enfantine, lui, dans son costume étriqué, équipé d’une paire de lunettes qui lui donne un air trop sérieux.
Les gags s’enchaînent avec la précision d’une horloge bien réglée : c’est la table à qui il manque un pied, c’est le conférencier assis obligé d’épouser la position de la table qui penche, c’est l’assistante qui clignote des yeux lorsqu’elle doit compter ou qui chante et danse sur l’air de « Il était un petit navire » pour étayer un propos…
Des prototypes de machines servent à illustrer les démonstrations de notre démographe : comme tout un système partant d’une poche à perfusion remplie d’eau, sous laquelle pend un bocal censé représenter la terre et la population mondiale, enfin un aquarium devant contenir les décès, comme le tableau qui permet à l’assistante et sa badine d’expliquer, grâce aux graphiques et aux chiffres les conclusions du démographe, sans oublier « le chariot d’automatisation » qui permet de robotiser les pauvres. Expérience qui s’avérera catastrophique pour le conférencier.
Cette conférence, d’une extravagance sans pareille, met l’homme en face de ses propres ratages et de sa difficulté à répondre à une situation qu’il ne domine pas.
Ceci mérite d’y réfléchir.
Un vrai moment de bonheur a plané, ce soir, dans la salle comble et chaleureuse du Centre Culturel.
Qu’est-ce que je suis déçue…. de ne pas avoir vu cela! Car, en ce moment, on a vraiment besoin de “déjanté” et de “désopilant"!