Le sport, oui ! Le foot, non !
Depuis le début de l’EURO 2016 de football, d’où me vient cette désagréable impression de malaise devant les montagnes d’images, de sons et de phrases qui nous écrasent ? Je me sens au bas d’une falaise à me promener en regardant le ciel si haut, si dangereusement haut. Les enfants à l’école et dans la rue du village, s’habillent aux trois couleurs et s’en peignent le visage, des drapeaux flottent aux balcons et aux fenêtres des étages, les commerçants décorent leurs vitrines et les groupes de supporters vrombissent de rage dans les cafés coyens à l’heure des matchs. On ne se reconnaît plus dans les gens. Nos « concicoyens » se sont laissés pousser des crêtes de coq ridicules sur le sommet du crâne et déambulent en bandes tonitruantes. C’est peut-être mieux qu’une corne de rhinocéros, mais ça fait peur. Et tout ça pour ce qui n’est pas un événement !
Qui se souviendra dans 10 ans des noms de ces héros des stades qui se ressemblent tous comme des gouttes d’eau, à part la couleur des maillots. De vieux aficionados attablés « Au Régent » parleront encore d’une poignée d’entre eux, mais les coupes du monde effacent les coupes d’Europe que gomment les Jeux Olympiques. Il ne reste plus que l’enthousiasme grégaire. Il se dépose en fines couches successives, en strates de sexisme sédimentaire, dans les esprits embrumés d’adultes éméchés et dans les cerveaux fragiles de nos marmots. De quel culte relèvent ces dieux du stade, virils, normés, quasi militarisés ? Les enfants affichent au-dessus de leur lit leurs effigies dans un consensus universel étonnant ! Ils y remplacent les crucifix de nos grands-pères. Ces dieux sont ceux de la religion de la virilité guerrière. Notre Terre, symbolisée par le ballon, est une chose précieuse. Ils se la disputent en la frappant avec acharnement. Nos garçons seront encore et toujours éduqués à être d’excellent frappeurs, de joyeux cogneurs dont l’audace et la violence pourront leur accorder gloire et fortune. Ne jouons pas ce jeu. Il est fait pour « normer » le monde, stéréotyper les individus, assigner les gens à leur image corporelle ! Ils y deviennent des choses. « T’es un homme si t’es le plus fort et une femme si tu es la plus belle ! » Nous, les autres, les petits yeux, les sans dent, ceux qui depuis toujours savent qu’ils sont « carton rouge » dans cette société de vainqueurs, ne leur faisons pas l’honneur de les regarder et d’applaudir à leurs exploits frelatés. Ne nous sentons pas obligés d’être fiers de leurs victoires. Leurs gloires sont construites sur nos disgrâces et leurs fortunes sur nos fins de mois difficiles. Le foot ? Rien à foot !
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1 commentaire
Commentaire de: Thierry Duvergé Visiteur
Quelle plume ! Bravo.
Encore
TD