Les trois châteaux : une nouvelle vie
« Les trois châteaux », ça sonne comme le titre d'un conte. Il était une fois en automne une route qui s’enfonce dans la forêt et les découvre un à un… Les arbres forment voûte et vous enserrent…
Au printemps, il y avait encore là des galopades d'enfants dans les étages et la cloche qui sonnait les récréations. A l’été, les châteaux se sont enfoncés dans le silence....
Depuis le vendredi 13 octobre, ils s'animent à nouveau.
Des lointaines îles des Caraïbes un ouragan dévastateur a poussé vers ces anciennes demeures de banquiers du XIXe siècle quarante familles et leurs quatre-vingt-dix enfants. Il a écrasé leur vie, il ne leur a rien laissé. Derrière elles, leurs parents, leurs souvenirs, leurs biens, leur culture, la mer et l'infini de l'horizon.
Devant elles, l'inconnu d'une vie à reconstruire.
Depuis le moment où les autocars les ont déposées au pied du premier des châteaux, après trois semaines d'attente dans un hôtel d'Orly, les 156 personnes venues des îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy apprennent à vivre entourées par la forêt. Tous les repères familiers ayant disparu, il faut tout réapprendre.
Le 13 octobre, les chambres sont prêtes – nouvelles literies, lits-parapluies pour les bébés, draps, couvertures, linge de toilette –, les repas vont être livrés. L'école peut ouvrir ses classes. Les trois professeurs ont tout préparé en quelques jours. Livres, cahiers, crayons, rien ne manque. La classe maternelle est si jolie avec poupées, peluches, voitures, pots remplis de feutres, livres et chevalets pour la peinture. Les vingt petits qui entreront là auront le sourire.
Les deux autres classes sont sobres et disposent d'un bon mobilier scolaire resté en place. Les maîtres de l'ancien internat de la ville de Paris avaient pourvu leurs élèves de manuels scolaires en excellent état... Laissés là dans l’attente d’être emportés, ils ont tout à coup l’opportunité de s'ouvrir à nouveau pour des enfants venus de l’autre bord de l’Atlantique. Heureuse et possible transmission du savoir.
La solidarité à l’œuvre
Par le bouche à oreille, des habitants de Coye avaient appris le samedi 7 octobre que près de 150 sinistrés de ces îles des Antilles arriveraient quelques jours plus tard au Domaine des Trois Châteaux. L'association France Horizon serait mandatée par le Ministère de la cohésion des territoires pour gérer leur hébergement et l'Inspection académique de l'Oise assurerait l’ouverture de l'école du Domaine. Trois professeurs des écoles seraient nommés pour une cinquantaine d'élèves répartis en trois classes, dont une maternelle. Quant aux collégiens et lycéens, ils seraient accueillis dans les établissements voisins, déjà fréquentés par les jeunes Coyens.
Comme on le sait, l'école avait fermé début juillet. (Les habitants de Coye se rappellent le douloureux moment de la fermeture du Domaine, la manifestation du personnel licencié, le départ des enfants.) Il a donc fallu réorganiser les lieux en une semaine à peine, les rendre propres et accueillants. Pour épauler les nouveaux enseignants des trois classes, l'association Solidarité Coye n’a pas hésité à entrer en action. Une collecte de papeterie fut lancée dans les écoles de Coye pour que chaque écolier trouve sur sa table au moins un cahier et un crayon. Des bénévoles se sont occupés de disposer au mieux le mobilier scolaire et d'aménager agréablement la classe maternelle. Les dons sont arrivés de toutes parts : livres, jouets, papier... Les écoles de Coye ont prêté un petit mobilier, une jolie et vieille cuisinière en bois, une ferme. Les élèves de l'école du centre ont créé et peint un panneau de bienvenue pour le hall de la future école des Saint-Martinois.
Et c'est ainsi que le lundi 16 octobre tout le monde était à l'école.
Et depuis, les membres de l'association collectent des vêtements chauds et de bonnes chaussures – les Coyens sont généreux. L’appel aux dons a été relayé par des associations, des amis, des contacts divers, jusqu’à Senlis, Compiègne, Précy-sur-Oise, Lamorlaye… . Aucune journée ne se passe pour les nouveaux habitants de Coye-la-forêt sans qu'ils reçoivent aide et visites. Ils sont curieux de découvrir le village, la forêt et la région proche. Toute proposition de promenade et de découverte est la bienvenue. Des échanges se font et des liens amicaux se tissent donc avec une grande facilité.
Plusieurs associations du village ont eu à cœur d'être accueillantes et solidaires :
- l'association des familles par un don important et l'accès facilité à la bourse aux vêtements,
- le vestiaire de Sofie par de nombreux dons de vêtements et chaussures,
- un nouveau collectif « Ensemble pour Saint-Martin » qui milite pour la gratuité des transports.
D’autres proposent aux jeunes Saint-Martinois l'accès aux activités. Pour commencer, le judo (club AM3F), le basket, la marche (La Sylve) et la chorale (Les Très Riches Heures de la Thève).
Tout un réseau solidaire s’est donc mis en place pour adoucir, pendant leur séjour à Coye-la-forêt, la vie de familles fortement éprouvées, leur faire oublier, ne serait-ce que brièvement, la violence de ce qu'ils ont subi, et leur redonner force et espoir pour reconstruire une vie.
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7 commentaires
Commentaire de: Alain Mariage Visiteur
Commentaire de: Perrine VIRGITTI Visiteur
Comme vous le dites si bien, de façon si poétique, aux 3 châteaux, des lointaines îles Caraïbes, 150 personnes, soit 40 familles sont en difficultés. Mobilisation sans précédent de tous et toutes, prise en charge privilégiée des associations, écoles, autres communes, sans oublier France Horizon et les fonds de l’Etat débloqués pour ce drame.
BRAVO!
Question : Combien de familles en difficulté quotidienne à Coye-la-Forêt ? Combien de personnes isolées que seuls le CCAS et quelques bénévoles accompagnent tout au long de l’année ?
Si toute cette belle mobilisation pouvait, au moins pendant quelques semaines, atteindre les Coyens en difficulté…
Vous me direz : Nous n’en savions rien ! Pas tout à fait vrai… Comme vous le dites vous-même : le bouche à oreille fonctionne très bien dans notre commune… même si nous nous devons de garder la confidentialité de certaines situations personnelles!
Perrine VIRGITTI -
Commentaire de: Geneviève Durand-Carré Visiteur
Bravo à Marie-Louise pour cet article qui dit très bien ce que nous vivons depuis l’arrivée des "réfugiés climatiques" de St Martin à Coye-la-Forêt. Merci à tous les bénévoles que ce soit, ceux de Solidarité Coye ou des associations de Coye-la-Forêt, ou bien d’autres coyens qui se sont mis à la disposition de l’Association France-Horizon pour aider à l’accueil des familles et des enfants.
Pour répondre à Perrine, il me semble que Solidarité Coye a été sollicité par le CCAS pour aider un Coyen en difficulté, - et malgré le but de ce Collectif, qui est d’aider les réfugiés à travers les Associations qui sont en lien directement avec eux,- nous avons répondu présent. Mais le CCAS étant tenu au "secret professionnel", il est impossible de connaître toutes les situations de détresse présentes dans le village. Cependant, je connais un certain nombre de Coyens qui aident d’autres Coyens, en difficulté, sans que le CCAS intervienne personnellement, car quels liens y-a-t-il entre le CCAS et les "Coyens de base" ?. Il y a donc des Coyens qui sont des "voisins vigilants", mais dans la bienveillance. Oui, le bouche à oreille fonctionne, mais sans lien avec le CCAS. Et en plus, il est difficile d’en faire partie, j’en ai fait l’expérience il y a quelques années.
Commentaire de: Alain Mariage Visiteur
Bonjour,
Je tiens ce matin à dire que je trouve le message de Perrine Virgitti un tant soit peu réducteur. Sauf à être initié à la vie locale une lecture rapide laisse entendre qu’à Coye seul le CCAS et quelques bénévoles ont une action sociale vis à vis des personnes en difficulté.
Il n’en est rien et nombreux sont ceux qui participent de près ou de loin, au travers d’une association, d’une structure ou non à l’aide envers les personnes en difficulté, défavorisées.
Ce qui me gène également dans ce commentaire est que l’on est amené à comparer deux situations qui n’ont rien à voir. Les familles Coyennes et comme dit entre les mots “dont on ferait bien de s’occuper” et les familles de St Martin qui sont arrivées récemment pour lesquelles “tout aurait été mis en oeuvre".
N’oublions pas que ces derniers ont TOUT PERDU.
N’oublions pas qu’ils ont été obligés de quitter leur Pays, leur Terre, leur Famille.
RIEN de comparable.
Un grand mouvement de solidarité était plus que nécessaire et normal, que ce soit à Coye ou ailleurs.
Celà me rappelle un commentaire récent au sujet des réfugiés de Syrie et d’ailleurs où il était dit que l’on ferait mieux de s’occuper des personnes sans domiciles fixes Francais.
Pourquoi toujours tout comparer comme cela?
Il y a tellement d’autres moyens d’appeler à plus de générosité, d’écoute, de partage.
Commentaire de: Nora Muller Visiteur
Il n y a même pas de question à se poser. Quelqu’un a besoin d’aide ? Si on le sait, on agit. Coyen ou rapatrié.
Commentaire de: Darrondeau Marie Visiteur
Espérons que ce type d’événement puisse permettre la réouverture des trois Châteaux car l’établissement est en parfait état et qu’ il faut penser aux salariés que vont bientôt être licenciés.
Commentaire de: LEBRET Claude Visiteur
Il faut rappeler que des salariés du Domaine des Trois Châteaux, bien qu’en dispense d’activité, ont été mobilisés pour aider au mieux à l’accueil de cette population fortement éprouvée.
Merci et bravo à Marie Louise qui comme d’habitude avec la douceur de son écriture nous informe parfaitement.
Ravi de voir l’accueil des Coyens et voisins pour les réfugiés de St Martin accueillis au domaine des 3 chateaux. Surement des idées de belles rencontres.