On a un urgent besoin d'espoir
Le monde tremble et s’écartèle. Les scientifiques du monde entier lancent des cris d’alarme devant tous les indicateurs du réchauffement climatique passés au rouge. Des catastrophes s’annoncent, effrayantes et irrémédiables. Les négationnistes se font légion pour protéger le plus longtemps possible les derniers profits des puissants arnaqueurs de la haute finance internationale. Les cassandres annoncent tsunamis et cyclones, guerres et massacres de masse, jusqu’à faire craindre l’extinction de l’espèce humaine. Tout est si sombre qu’il devient difficile de soutenir le regard des enfants quand ils parlent d’avenir. Les cyniques et les aigris se délectent de leur propre égoïsme sous le couvert d’un pessimisme grinçant. Mais dans les têtes, d’autres secousses telluriques agitent l’univers. Les femmes ont pris la parole.
Les réseaux sociaux de la planète ont diffusé la vérité des victimes telles des flammes vivantes. Le feu a pris et la chaleur de l’incendie a explosé les premiers plafonds de verre. Les hashtags « balancetonporc » puis « metoo » ont relayé les confidences d’abord hésitantes des victimes de harceleurs et de violeurs, hommes puissants indécents qui jusque-là les avaient réduites au silence. Elles n’ont pas attendu les premières condamnations, joignant les accusations aux cris de revanche de leurs sœurs d’infortune, pour confondre publiquement leurs tortionnaires. Partout dans le monde, les femmes accusent. En Inde, en Europe, aux USA, en Amérique du Sud, les témoignages s’amoncellent, les révélations de ce qui était refoulé depuis des années sortent de l’ombre. Les femmes entendent les femmes. Elles découvrent l’immensité de leurs souffrances en dissipant un peu l’impunité éternelle de leurs agresseurs. La tectonique des plaques rapproche les sentiments et la rumeur publique crie vengeance. Les vieilles féministes n’auraient jamais cru assister de leur vivant à une telle vague d’exigence de justice et de vérité. Quelque chose comme de l’enthousiasme serre la gorge. L’espoir renaît pour une société différente, égalitaire. La vieille démocratie se réveille dans les frissons d’un vent de nouveau monde. La planète n’attendra pas. Un cancer mortel la ronge. Il est urgent d’espérer.
PARTAGER |
2 commentaires
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Membre
Commentaire de: Françoise Visiteur
Comme pour tout mouvement à son début, il risque fort d’y avoir des excès, des débordements, des accusations injustifiées et des innocents accusés et condamnés à tort comme cela peut se produire dans certaines affaires de pédophilie.
À la justice de faire son travail.
Mais on peut espérer ensuite une période apaisée où rien ne sera plus comme avant. Oui, la honte doit changer de camp, passer des agressées aux agresseurs. La colère devenue légitime remplacera la résignation.
Eh oui ! et pourtant…
Il y a quelque chose qui me gène dans « Balance ton porc ». D’abord, la vulgarité de l’expression ; à la hauteur, me dira-t-on, de la veulerie de ceux que l’on dénonce. Oui, eh bien, justement ! Ne nous abaissons pas !
Ensuite le principe de la dénonciation : utile bien sûr, pour que la honte et la peur changent de camp, mais qui me fait penser aussi à des époques historiques troublées où l’on pouvait profiter du mouvement général d’épuration pour régler des comptes entre voisins, ressortir de vieilles haines politiques ou familiales, avec des histoires invérifiables jeter le soupçon sur tout le monde. Il y a quelque chose de malsain dans cette démarche.
À vrai dire, je n’aime pas les cris de revanche et les appels à la vengeance, c’est toujours ainsi que l’on part en guerre.
Les témoignages accumulés de « metoo - moi aussi», par leur nombre et leur concordance, arrivent effectivement à lever un couvercle, à rompre le silence. Mais ce qu’il faut dénoncer, ce ne sont pas forcément des personnes, mais plus fondamentalement un état de fait généralisé, hypocritement maintenu caché et considéré comme banal voire normal. Quelle femme, par quel miracle, ne figurerait pas sur la liste infinie des importunées, humiliées, écrasées, soumises, exploitées, agressées, violentées, violées, saccagées ? Donc oui, c’est bien de pouvoir le dire et même le crier… Mais pas sur le mode de la vengeance.
Bien sûr, chaque fois que c’est possible et qu’on en a le courage, il faut porter plainte, aller devant la justice. Mais c’est autre chose que « balancer », faire preuve de bassesse et s’engouffrer dans une brèche, de façon indigne, pour assouvir de vieilles rancunes et des règlements de compte personnels.