Inauguration du 38e Festival théâtral de Coye-la-Forêt
Beaucoup de monde au centre culturel en ce vendredi 5 avril, comme un avant-goût de notre rendez-vous du printemps : dans moins d'un mois, avec le 38ème festival de Coye-la-Forêt, débutera cette année encore la grande fête du théâtre dans notre petite ville de Picardie.
Désormais, la présentation du festival elle-même fait partie des rendez-vous à ne pas manquer. Après les remerciements d'usage, le comité de sélection et de programmation fait une rapide présentation des quatorze spectacles qui seront proposés cette année (en dehors des pièces spécifiquement réservées aux scolaires) : comme toujours il y en aura de toute sorte et pour tous les goûts : comique, poétique, burlesque, musical, insolite, classique revisité, résolument contemporain en prise sur le monde d'aujourd'hui, émouvant, hilarant, réjouissant, bouleversant… on peut multiplier les épithètes à l'infini, le spectacle vivant une fois encore sera présent dans toute sa diversité. Les dépliants sont dans toutes les mains, qui récapitulent l'intégralité des pièces au programme, afin que chacun fasse son choix. Et si choisir est trop difficile – car tout fait envie – on peut décider d'aller tout voir !
Une vie d’artiste
Pour nous faire goûter la magie et le mystère du théâtre, le festival nous a proposé, comme les années précédentes, une petite mise en bouche en nous offrant de déguster une saynète écrite et dirigée par Jacques Bona. La scène est rapidement dégagée. Place à "Une vie d'artiste" !
Tandis que les applaudissements crépitent puis progressivement se taisent, le rideau de scène se ferme, la salle se vide, le spectacle est fini. Mais non, au contraire, le spectacle commence ! Personne n'a quitté son siège et le rideau, très lentement, s'ouvre sur une scène désertée où demeurent quelques éléments de décor. Apparaît alors une jeune femme : c'est Anna, ou plus exactement c'est une comédienne qui vient de jouer le rôle d'Anna et qui, avant de rentrer chez elle et de retrouver la vie ordinaire, revient sur le lieu de son triomphe, s'attarde dans le théâtre silencieux où ne brille plus que la lampe de service (the ghostlamp, comme disent les Anglais). Elle prolonge quelques instants encore l'exaltation qu'elle a éprouvée à jouer ce soir car la vie n'est nulle part ailleurs aussi intense que sur scène.
Mais tandis qu'elle se croit seule, surgit un personnage insolite, un certain Bip, tout habillé de blanc, qui secrètement demeure en ces lieux, à la fois clown et fantôme, sans doute génie du théâtre, esprit fantaisiste présidant à la destinée de l'endroit.
Tandis qu'il demande à Anna de rejouer des morceaux du spectacle qui vient de se terminer, c'est de fait une autre pièce qui se joue, et nous avons sous les yeux une comédienne, une vraie comédienne (Michèle Sergent), qui joue une comédienne (qui, dans la pièce ne veut pas avouer son nom) qui, elle-même, joue le personnage d'Anna. Jacques Bona comme à son habitude aime à nous perdre dans une mise en abyme où l'on ne sait plus départager la fiction de la réalité, le premier, le deuxième et le troisième degré… car en fait et toujours, dès lors qu'on joue sur scène, on est dans l'imaginaire, les personnages, quels qu'ils soient, n'existent pas, ils sont tous "faits de l'étoffe dont sont tissés les songes".
Le théâtre est peuplé de fantômes, petits et grands, qui tournent sur la scène, jusqu'à ce qu'un technicien, ou plus exactement un personnage de technicien, ou même pour être tout à fait précis, un comédien jouant le personnage d'un technicien, vienne, en soulevant les draps des fantômes, mettre fin à la fiction ; démasqués les comédiens n'ont plus qu'à saluer et quitter la scène. Démaquillés, débarrassés de leurs perruques et de leurs costumes, et surtout dépouillés de leur personnage, ils se retrouveront comme des gens ordinaires dans la vraie vie, plate et banale, à partager le pot de l'amitié qui conclut la soirée.
Avec chaque année une imagination renouvelée, avec une conviction teintée d'humour et de poésie, Jacques Bona revient sur ce thème qui lui tient à cœur : la magie du théâtre qui nous transporte dans un univers imaginaire plus vrai et plus intense que le monde réel.
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