La dissociation
Qui écrit ce que j’écris ? Qui suis-je : moi ou Moi ? Trump ou Obama ? Enkidou ou Gilgamesh ? Hyde ou Jekyll ? Sommes-nous obligés en permanence de choisir le côté blanc ou le côté noir de la force ? Dieu ou Satan ? Il y a des jours où la dissociation a quelque chose de déchirant. Dissocier, c’est scinder ce qui est attaché. C’est séparer, couper, mais aussi trancher, tronçonner, voire désagréger. Le terme a surgi avec un sens nouveau sur les réseaux médiatiques pour désigner les conséquences psychologiques d’un état de choc. Dissocier ne veut plus dire séparer le bon grain de l’ivraie, mais déconnecter son cerveau pour survivre à des émotions si violentes qu’on en mourrait. C’est un mécanisme de protection psychique à des évènements extrêmes, des agressions sexuelles, des deuils abrupts. Une anesthésie mentale coupe la perception de son corps. Dans un sentiment d'étrangeté, on flotte à l’extérieur de soi. La perception de la douleur est remise à plus tard. On ressemble à un automate indifférent : une étoile de mer figée dans la tempête. Les personnes dissociées se sentent des coquilles vides, comme mortes à l'intérieur d'elles-mêmes. Les zombies des horreurs de la vie vivent sans vivre. Mais pour entendre les informations, voir les actualités, scroller sur les réseaux sociaux et puis continuer à faire les courses, le ménage et la cuisine, on dissocie, non ? Pour préparer les vacances, faire son travail avec conscience et dormir la nuit sans penser aux horreurs des massacres, aux viols de guerre et aux corps mutilés des jeunes hommes abandonnés dans les fossés, on dissocie. Donner une limonade bien fraîche à son gosse en lui demandant d’arrêter de se plaindre qu’il fait trop chaud, il faut dissocier. Les évènements climatiques extrêmes se multiplient sur la planète et on sait qu’après avoir bu sa limonade, son avenir restera plus qu’incertain. La schizophrénie est une maladie mentale et n’a rien de drôle à vivre. Étienne de la Boétie s’étonnait devant la servitude volontaire des peuples aux pieds des tyrans de l’Histoire humaine ? N’étaient-ils pas déjà dissociés ? Quand trop, c’est trop, alors on dissocie. « Comment ça va, ce matin ? il fait beau, non ? » et on s’entend répondre « Ça va très bien ! Manque que la plage et les mouettes ! ». Demain, c’est la fête de la musique. Alors « Débranche ! » chantera-t-on !
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