Il coro di Babele
de Claudio Zappala
Ils sont jeunes, sympathiques, pleins d'énergie, ils sont comédiens, ils nous parlent ; et nous, les spectateurs, nous regardons ailleurs. Nous regardons en l'air. Nous avons le nez levé vers les sous-titres qui s'affichent sur un écran quasiment dans les cintres, tandis que les comédiens sur la scène s'expriment, pas simplement par la voix, mais aussi par les mouvements du visage, par les gestes, par toute une chorégraphie savamment mise au point. Ainsi, inévitablement, on manque la moitié de la pièce : soit on regarde la scène et on loupe les sous-titres, soit on regarde le texte et on loupe le jeu des comédiens. En plus, le spectacle est présenté dans le programme comme étant pour "tout public" : donc les moins de 10 ans peuvent le voir puisqu'il existe une classification spécifique "+10 ans". Or de toute évidence les enfants ne pourront pas arriver à suivre, quand les adultes eux-mêmes ont du mal à lire les sous-titres qui défilent à vive allure.

Il y aurait pénurie de spectacles présentables, je ne dis pas. Mais il y a abondance de pièces formidables dans le festival off d'Avignon ! Quelle idée d'avoir choisi de programmer celui-ci, en italien ? Quel intérêt, sachant que nous en manquerons forcément la moitié ? Quelle nécessité ?

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2 commentaires
Commentaire de: uzan paul Visiteur
J’entends bien votre critique, cependant celle-ci sous-entend que le choix de la langue italienne serait un obstacle à la compréhension ou à la pertinence pour un public non italophone.
Bien au contraire , jouer en italien est un acte symbolique fort: cela évoque la richesse, la fragmentation et la beauté des voix multiples, précisément ce que raconte la pièce.
L’Italien devient ainsi un outil de résonnance culturelle et poétique, et non un simple vecteur d’information.
L’universalité du théâtre ne dépend pas de la langue; elle dépasse les mots par les gestes, les émotions, la musique, la scénographie.
C’est précisément tous les ingrédients qui étaient réunis dans cette piece.
Le théâtre ne se limite pas à une compréhension littérale; c’est une expérience sensorielle et émotionnelle.
Il faut parfois se laisser emporter par la magie des corps, de la musique et de la danse , fermer les yeux et rêver.
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
À mon tour de bien entendre votre propos !
Merci de nous donner une leçon sur ce qu’est le théâtre. Pour ma part je crois savoir un peu de quoi il retourne, et je sais qu’en effet, ce n’est pas forcément la compréhension littérale du texte qui est le plus important, je le sais d’autant mieux qu’étant malentendante depuis mon enfance, j’ai l’habitude de ne pas tout comprendre (au besoin je me procure le texte avant ou après avoir vu la pièce). Mais précisément, c’est au nom de tout ce que vous expliquez si bien ("il faut se laisser emporter ", etc.), c’est au nom de la qualité visuelle et émotionnelle du théâtre, au nom de l’attention et du respect qu’on doit porter aux comédiens, que je proteste !
Si vous êtes convaincu de ce que vous écrivez, allez au bout de votre logique et lorsque vous nous proposez un spectacle qui se joue dans une langue étrangère, n’y mettez pas de surtitres ! Laissez-nous nous immerger dans la scène, entendre la musique de la langue, admirer les décors et les lumières, et vivre avec les comédiens. Les surtitres parasitent le spectacle.