NATURE MORTE DANS UN FOSSÉ
De Fausto Paravidino
Mise en scène et interprétation : Collectif DRAO
Mise en scène et interprétation : Collectif DRAO
La cité des enfants perdus
Le monde des dealers et petites frappes nous saute au visage dès la première scène très crue de la pièce. Cette rencontre choc nous entraîne dans l’enfer d’une périphérie sans horizon, anti-nature où il n’y a plus qu’à survivre. Nous serons conduits avec chaleur et humanité dans une société qui exclut tout le monde.
La deuxième scène est la scène de crime, d’une étonnante beauté plastique et l’on y découvre sur le terrain un inspecteur sans illusion. Suivent étape par étape les phases d’une enquête rudement menée. La vérité sort du témoignage d’une prostituée mélomane fuyant un pays en guerre.
Pas moins de 25 personnages que le destin affronte à la nécessité de survivre dans la jungle urbaine de cette Italie moderne, semblable à toute cité occidentale. Chacun est chargé d’un rêve ou d’un désir, auquel il lui faut renoncer aux prix d’un ulcère, ou d’une dépendance ou de l’asservissement. Les exclus s’entre dévorent, les notables se dissimulent derrière les apparences.
Pas moins de 25 personnages que le destin affronte à la nécessité de survivre dans la jungle urbaine de cette Italie moderne, semblable à toute cité occidentale. Chacun est chargé d’un rêve ou d’un désir, auquel il lui faut renoncer aux prix d’un ulcère, ou d’une dépendance ou de l’asservissement. Les exclus s’entre dévorent, les notables se dissimulent derrière les apparences.
La rédemption vient peut-être de l’acharnement de l’inspecteur, ce chevalier de la zone, le seul à être rationnel ; il veut remplir le trou de 5 heures où la jeune fille a disparu. Salti est le saint laïc, qui a le pouvoir de terrasser le monstre. Encore une histoire d’enfant assassiné, une fille, mais l’Agamemnon moderne n’a rien d’épique : c’est un mari bafoué, un bourgeois bien conformiste. Anniversaire et prix de poésie, n’ont pas suffi à protéger la falote et fragile jeune fille des enfers artificiels. La mère aveugle, de la génération peace and love, s’interroge vainement : sa petite fille, un sujet à risque? La conscience arrive trop tard.
Les mots et l’action
Pénombre, lampes, cuirs sombres nous conduisent de la nuit sordide au jour : unité de temps qui concentre les péripéties et permet une accélération du rythme jusqu’au rouge lumineux de la femme-ange, la réprouvée. À l’opposé, l’unité de lieu éclate, le passage d’un lieu à l’autre se fait par la valse du mobilier, changé en un clin d’œil. Notre œil habitué à l’ellipse par la rapidité des séries télé, n’en est pas perturbé. Comme dans la tragédie grecque, l’action est commentée par un discours, ici monologue ; chaque personnage porte en lui le chœur, ce qui est joué est ce qu’il revit et revoit. Le dédoublement finit par se matérialiser. Une pure forme théâtrale, à l’opposé de Porté disparu ou des Experts. La langue renouvelée, abrupte, touche au vrai.
La danse des corps et des objets
Très belle chorégraphie de Gilles Nicolas
Les phases d’excitation et de lenteur alternent, culminant dans la bataille des exclus. Les objets participent à cette danse lente ou furieuse, transformant en funambule le dealer, en cène le repas des bourgeois où la jeune fille se fige dans la posture du Christ. Les fils -de téléphone, de perfusion, de la scène de crime- attirent le regard. Dans l’affrontement, les armes paraissent plus ludiques (Cluedo ) que dangereuses, créant un effet tragi-comique. Cris, chuchotement, musique forment avec efficacité la basse continue du ballet.
Les phases d’excitation et de lenteur alternent, culminant dans la bataille des exclus. Les objets participent à cette danse lente ou furieuse, transformant en funambule le dealer, en cène le repas des bourgeois où la jeune fille se fige dans la posture du Christ. Les fils -de téléphone, de perfusion, de la scène de crime- attirent le regard. Dans l’affrontement, les armes paraissent plus ludiques (Cluedo ) que dangereuses, créant un effet tragi-comique. Cris, chuchotement, musique forment avec efficacité la basse continue du ballet.
Les drogues
Omniprésentes, elles s’imposent, même parfois trop, fumer sur scène n’a pas été jugé utile par tous. Les truquages auraient pu remplacer le tabac. Les drogues infiltrent cette société désespérée, un monde que l’inspecteur voit comme « divisé en victimes et en bourreaux ». Il voudrait bien que le crime « ne soit qu’une affaire de drogue ». Le sacrifice des jeunes nous concerne, nous effraie ; on peut regretter la lourdeur du propos politique qui désigne implicitement Berlusconi comme responsable.
Le public du Festival n’a pas ménagé ses applaudissements, admirant la performance des acteurs et l’énergie de la mise en scène. Parfois agressé, au moins dérouté, il a suivi le fil du labyrinthe. Le théâtre remplit ici pleinement son sens originel : le débat sur notre société.
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