CINQ JOURS EN MARS
De Toshiki Okada
Cie des Lucioles
Mise en scène : Jérôme Wacquiez
Il n’aura fallu que quelques secondes pour comprendre que la pièce de Toshiki Okada n’était pas un long fleuve tranquille. Au contraire, c’était une bouffée d’énergie qui a bousculé - peut-être trop parfois – le théâtre de Coye-la-Forêt lundi soir.
Une énergie portée principalement par les sept jeunes comédiens de Cinq jours en mars qui incarnent méticuleusement leurs rôles du début à la fin bien qu’ils soient isolés à chaque scène. Ambiance survoltée, dialogues ciselés, débit de parole élevé…tous les ingrédients étaient réunis pour happer le spectateur. Les successions de tableaux et les rôles interchangeables se sont enchaînés naturellement sans que l’on perde le fil de l’histoire.
Mais au-delà du jeu des acteurs et des décors dynamiques, Cinq jours en mars est avant tout une pièce qui en dit long sur la « génération Y », ces jeunes âgés entre 20 et 30 ans qui ne peuvent pas vivre sans leurs téléphones portables.
La pièce raconte la rencontre de deux jeunes à un concert au Japon et qui vont passer cinq jours dans un « love hotel » pendant que la guerre en Irak éclate. Des jeunes pressés, précaires, perdus qui vivent dans un monde où tout va toujours plus vite. Des jeunes insensibles, égoïstes, révoltés qui ne croient plus vraiment en l’amour. Des jeunes qui se sentent seuls et qui en ont peur.
Au final, Cinq jours en mars dépeint l’homme occidental d’aujourd’hui mais le fait avec humour et bienveillance. Reste à savoir si les générations antérieures ont apprécié cette fresque 2.0…
Galerie Photos : CINQ JOURS EN MARS De Toshiki Okada
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2 commentaires
Commentaire de: Marie Louise Membre
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Visiteur
Je ne vois pas comment on pouvait perdre le fil, vu que de fil il n’y avait pas, on tournait en rond, à ressasser la même histoire, extrêmement ténue et à peu près sans intérêt.
Cette notion de génération me semble très contestable, elle procède d’un jugement réducteur (pour ne pas dire “raciste"), on dit “les jeunes", comme on dit “les femmes", “les étrangers"… on généralise à partir d’un cas particulier et on prétend dresser le portrait de toute une catégorie de gens en niant leur individualité.
Car en nous présentant des personnes interchangeables, on les vide de toute singularité, de toute humanité ; on ne cherche pas ce qui fait qu’on pourrait s’intéresser à eux et éprouver de l’intérieur un peu de compréhension et de sympathie. Ils deviennent des figures vides et donc des caricatures. Dès lors, on est là comme au zoo, à regarder sans comprendre.
Qu’il y ait parmi les jeunes adultes dans notre société “occidentale” (terme étonnant s’agissant du Japon, mais enfin la Terre étant ronde on est toujours à l’ouest de quelqu’un, et là-bas comme ici, aujourd’hui comme hier, il y a des gars barrés, complètement “à l’ouest"), qu’il y ait des gens chez qui la dépression prend cette forme de nos jours, on ne peut le nier. Mais le spectacle ne permettait de les comprendre ni de l’intérieur, ni de l’extérieur : qu’est-ce qui fait qu’on en arrive là, comment s’explique ce phénomène, quel est le processus qui conduit à une telle déréliction ? Pourquoi ? comment ?
Le spectacle nous montre (complaisamment) des comportements étranges (stéréotypés, hystériques…), mais ne permet pas de diminuer cette distance entre “eux” que l’on regarde comme des bêtes curieuses et “nous” (public, jeune ou vieux, étranger à ce monde définitivement hermétique, qu’il nous arrive pourtant de côtoyer, mais en restant dehors).
“Cinq jours en mars” est une pièce sans amour. Les personnages n’en éprouvent pas, on l’aura compris, mais l’auteur non plus (ou le metteur en scène ?, ne connaissant pas l’œuvre originale, il est difficile de dire où ça se situe). Et moi, spectateur, pas plus. À aucun moment je n’ai vibré à ce spectacle affligeant.
La génération très antérieure a apprécié! Certes, en sortant je me suis dit : “Il ne reste qu’à acheter la corde pour se pendre!” Car le sujet de la pièce est assez glaçant. On est dans le vide. Et puis, la construction de la pièce est déroutante et refuse le fil conducteur rassurant. Je me suis perdue parfois, j’ai lâché le fil.
Mais la mise en scène et les comédiens sont vraiment toniques et captivants. Un mouvement incessant,des mimiques, des couleurs, des gestes surlignés, des voix claires, fortes,un jeu assuré. Tout pour dire à l’auteur japonais si pessimiste que non, les jeunes ne sont pas vides. Ils sont là devant nous juste pour contredire l’auteur qu’ils interprètent. Bravo!