La tectonique des sentiments
Une pièce qui parle des mélanges insidieux entre les sentiments : l’amour, l‘orgueil, l’ambition, le désir, l’ennui, la haine, … bref une pièce qui parle de chacun de nous pourvu qu’on fasse l’effort de regarder au-delà des apparences…
Quand Diana dit à son amant, en pensant prêcher le faux pour savoir le vrai, qu’elle ne ressent plus les mêmes émotions qu’aux premiers jours, elle joue avec le feu et tout le monde va s’y brûler. Comme si nos vies reposaient sur un équilibre fragile de non-dits (on aime moins mais on s’y habitue), de désirs cachés (celui de la mère) et de chimères (l’ambition de Diane).
Et que penser de la réalité des sentiments de la petite prostituée roumaine, qui lit Musset en tapinant ? Est-elle vraiment si pure et amoureuse de Richard ou recherche t’elle inconsciemment le monde qu’il représente ?
Finalement, on ne sait plus trop ce que ressent chaque personnage alors même qu’ils parlent sans cesse de leurs sentiments. Tout pourrait basculer à chaque instant. L’amant pourrait finir sa vie à faire des mots croisés avec la mère (elle a tant besoin d’un homme) et Diana pourrait assouvir son côté masculin en recueillant la petite prostituée roumaine…
En tout cas, on voit mal comment la vielle pute pourra s’en sortir. Mais ça elle l’a toujours su !
La mise en scène est sobre, les tableaux se succèdent, ponctués de touches musicales bien choisies, pour faire monter le sentiment de malaise.
On peut regretter néanmoins des changements de décor trop longs et parfois inutiles. Les va et vient incessants d’accessoires cassent le rythme et agacent les spectateurs
Les rôles sont bien incarnés. Chacun est sa place. Une mention spéciale pour la vielle fille de joie et pour la mère qui sont particulièrement justes. Ces deux là devraient s’entendre pour se partager les hommes. Ca leur ferait du bien à toutes les deux …
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2 commentaires
Commentaire de: Jacqueline Chevallier Membre
Commentaire de: Lemoine Visiteur
Comparaison n’est pas raison !
Oui j’ai vu “nature morte dans un fossé". Oui c’est génial. Oui les changements de lieux ne s’embarassent pas d’accessoires d’opérettes. De là à dire que la mise en scène est inexistante dans la Tectonique, c’est comme dénigrer tous les films parce qu’ils ne sont pas aussi brillants que Citizen Kane !
Pourtant je ne suis pas vraiment bon public ni particulièrement indulgent avec la Lucarne mais cette fois ci j’ai accroché à l’histoire et apprécié le travail des acteurs. Pour moi, c’est bien le signe que la mise en scène ne doit pas être si mauvaise…
Avez-vous vu “Nature morte dans un fossé” la semaine dernière? En trois secondes, on passe d’un endroit à un autre : de la piaule d’un junkee au caniveau d’une route de campagne où a eu lieu le crime, du bureau de l’inspecteur chargé de l’enquête à l’appartement bourgeois des parents de la victime, de l’hôpital au trottoir où une immigrée de l’Europe de l’est fait le tapin. Pas besoin de réverbère d’opérette pour dire qu’on est dans la rue, pas besoin de théière et de petites fleurs pour évoquer un intérieur. On ne s’embarrasse pas d’accessoires (comme ce mot dit bien ce qu’il veut dire !). Ici tout est essentiel, signifiant. Le seul moment où l’on s’encombre de matérialité, c’est lors du repas en famille, avec le plat de spaghetti, et c’est pour exprimer que cet homme se bâfre. Quel vide comble-t-il ? On ne sait pas encore mais on voit qu’il se bâfre. Par là-dessus, une bande-son subtile qui ne sert jamais de bouche-trou. D’ailleurs de trou, il n’y a point. Tout est vif, enlevé, sensible, utile. Bref, voilà une mise en scène efficace, signifiante, énergique, intelligente, inventive, ébouriffante…
Exercices :
1°) cherchez d’autres adjectifs pour qualifier la mise en scène de “Nature morte dans une fossé”
2°) Reprenez un à un les adjectifs laudatifs et cherchez leur antonyme. Vous verrez qu’on peut tous les résumer par un seul terme : “inexistant”
Une mise en scène inexistante et les malheureux comédiens font ce qu’ils peuvent…