Brocante sous un crachin breton
Depuis quelques semaines les Coyens se préparaient : on fouillait placards, caves, garages, greniers pour y trouver de quoi remplir le stand de la brocante réservé depuis mars. Cette année c'était décidé, la collection de petites voitures anglaises allait y passer.
Car c'est une aubaine, la brocante. Tous ces objets accumulés, les vêtements trop petits, passés de mode ou dont on s'est lassé, les bibelots que plus aucun meuble de la maison ne peut supporter, les vinyles qu'on a laissés dans un carton et les livres qu'on ne veut plus ouvrir vont enfin vider les lieux. Normal, il faut de la place pour les nouveaux, l'encyclopédie de la musique, la taupe en plâtre ou la robe de chambre vieux rose pur synthétique.
La brocante plaît car c'est presque une histoire de troc. On se débarrasse pour acheter. Je te vends ma théière et j'achète ta cafetière. Liberté des prix, pas de tva. Un commerce joyeux, pour ainsi dire, où vendeur et acheteur connaissent la jubilatoire sensation du "j'ai fait une affaire".
C'est à l'Association des Familles que l'on doit depuis des années cette exaltation. Magali et Alain Mariage en sont les instigateurs. Magali, comme présidente de l'association, Alain comme organisateur de la journée, avec Christel Dewaël. Ils y travaillent depuis mars : envoi et réception de courriers, distribution de flyers, négociations avec la mairie, standard téléphonique, marquage au sol, prêt de tables... et le matin du dimanche 3 juin, à 5h30 dans la rue pour placer les barrières et diriger les exposants.
L'encadrement est plus fourni cette année : dix personnes au total pour gérer la journée. Bien repérables en tee shirt rouge ou gilet fluo. Alain est satisfait, avec 710 mètres de trottoirs occupés par environ 250 exposants, Coyens pour la plupart. La présidente de l'association l'est aussi puisque la brocante aura rapporté près de 4 000 euros, dont il faut déduire quelques dépenses, l'impression des flyers et leur distribution, les timbres... Il est important, précise Magali, de faire une bonne recette. Cela permet de répondre aux demandes du CCAS pour l'aide aux personnes en difficulté et d’acheter du matériel, comme de nouveaux portants pour la bourse aux vêtements et des tables que l’on prête à l'occasion. Par ailleurs des associations profitent de la brocante pour se faire connaître et financer leurs projets : Les Nouvelles Orgues en Thève se mobilisent pour la restauration de l’orgue ; Solidarité Coye apporte son soutien à une association de Calais, l’Auberge des Migrants ; et la Sylve propose à la vente ses fascicules sur le patrimoine de la région.
La fréquentation a été importante toute la journée. Au petit matin tout est gris, noyé dans un crachin qui fait frissonner. C’est l’heure des connaisseurs, ceux qui sont à la recherche d'un objet précis, un outil, un appareil électro ménager, un bon vêtement. Ils achètent vite et bien. Ils ont l'œil et l'expérience, ils ne traînent pas car ils savent repérer l'objet d'un bref coup d'œil. L’après-midi... ce sont les promeneurs du dimanche. Ils flânent, le regard qui flotte. Les acheteurs sont plus rares et difficiles. Le marchandage est âpre : un euro pour le vinyle de Michel Sardou, au lieu de 4. Tant pis, je préfère garder Michel Sardou, il restera dans son carton en bonne compagnie, Vivaldi et Brel sont de plaisants voisins.
On est surtout à la brocante pour passer un bon moment, on sait que l’on y retrouvera des connaissances et des amis, alors la vente devient presque accessoire. La rue est à nous, on se hêle, on s’arrête, on discute, on avance une chaise pour un visiteur fatigué, on regarde si les autres vendent, les enfants font rouler leurs voitures, les trottinettes slaloment. On mange une crêpe, on s’offre une barbe à papa. Vers midi, les apéritifs s’organisent, on fait la queue devant le marché pour les accras ou les kebabs. Avec un planteur, régal assuré. Les riverains sont parfois de la fête, on sent les grillades…
La brocante, c’est déjà un air de vacances.
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