Le mot du maire
Dans La lettre de Coye-la-Forêt du mois de novembre, François Deshayes débute Le mot du maire par une citation : Tous les commerces qui ouvrent ici ferment en général. C'est assez curieux, car d'habitude on met en exergue une phrase que l'on reprend à son propre compte et qui reflète l'état d'esprit général de l'article. Du coup cette citation donne une étrange impression de mauvais augure.
En fait, bien évidemment, monsieur le maire reprend cette phrase, qu'il dit avoir lue dans la presse locale, pour s'en moquer et critiquer son auteur. Or il n'y a lieu ni de se gausser ni de s'offusquer de tels propos, ils sont l'expression, certes condensée et raccourcie, mais malheureusement vraie, d'une réalité envisagée avec lucidité.
Monsieur le maire, lui, est dans le rêve, la croyance, les vœux pieux… Il construit des châteaux en Espagne. Il pourrait chanter la chanson de Guy Béart :
Suppose qu'on ait d'l'argent
et qu'on soit intelligent
on construirait une ville… et nous voilà partis dans des rêves de grands bâtisseurs.
Certes, il faut être entreprenant, mais en tant que responsable des affaires publiques, il faut également envisager toutes les hypothèses, lorsqu'elles ne sont pas totalement improbables.
En fait, il le dit lui-même, l'adhésion au projet municipal relève de la foi : il faut y croire. C'est ainsi que sur le blog mis en place sur le site officiel de la mairie, à un interlocuteur qui ose émettre des doutes sur la viabilité des commerces devant s'installer dans les locaux de l'école du Centre (dont on ignore et le nombre et la nature), François Deshayes répond (19 octobre 13:26) : Prévoir cette hypothèse aujourd'hui, c'est ne pas croire au projet.
Argument d'autorité. Le contraire même d'une argumentation.
Soit vous y croyez et c'est bien ; soit vous n'y croyez pas et vous êtes rejeté au rang des impies. Il faut quand même que Monsieur le maire se rende compte que, dans son propre camp, il y a bon nombre d'infidèles.
Ainsi, ceux qui ne font que décrire la réalité "les commerces ferment", ceux-là sont de mauvais sujets, montrés du doigt et on n'est pas loin de sous-entendre que c'est de leur faute finalement si ça ne marche pas.
Monsieur le maire, lui, s'enthousiasme et appelle au respect, voire à l'admiration : Regardez au contraire comme ça marche bien, six commerces installés (ou en voie d'installation) au cours des quinze derniers mois !
Ce qu'il ne dit pas, c'est que ces installations massives, loin de contredire la phrase mise en exergue ne font (et ne feront malheureusement peut-être) que la confirmer : car la plupart des commerces en question se sont ouverts dans des locaux qui avaient fermé. Le dire ou l'écrire, ce n'est pas le souhaiter. C'est simplement regarder la réalité en face. Ce n'est pas non plus le provoquer. Nous avons passé l'âge des superstitions.
Toujours sur Eklablog, François Deshayes affirme (19 octobre 16:00) : Concernant l'étude de marché, au cours des 5 dernières années, 2 ont été faites. Une supplémentaire sera certainement lancée. On a envie de dire : Arrêtez ! ce n'est pas la peine de continuer à gaspiller l'argent public dans des études complaisantes, aussi coûteuses qu'inutiles ! Nous n'avons jamais rien su des deux études de marché qui ont été faites au cours des cinq dernières années et nous ignorons totalement quelles en ont été les conclusions. Ce que nous savons, c'est que les ateliers de prétendue concertation des Coyens diligentée par la SAO ne révélaient aucune opposition fondamentale au projet municipal. Aujourd'hui, plus de 500 signatures et quelques vigoureux commentaires sur divers blogs démontrent - pour dire les choses aimablement - le caractère peu scientifique des concertations en question et des études du même acabit. Alors, arrêtons !
Que Monsieur le maire soit soucieux et fier d'attirer des commerces dans la commune, on le comprend, mais qu'il ne vienne pas nous dire que c'est pour "redynamiser le cœur de ville". Et surtout qu'il ne nous tienne pas pour responsables de leur éventuel échec. François Deshayes écrit : c'est aussi à chacun d'entre nous que revient la responsabilité de les faire travailler. Voilà bien une responsabilité qu'il nous faut refuser : nous n'allons pas nous mettre à consommer à tort et à travers juste pour que les commerces nouvellement implantés puissent demeurer à Coye.
Car enfin la fermeture des petits commerces de proximité ne relève pas de la responsabilité individuelle de tout un chacun. Elle résulte d'un choix de société. La dévitalisation commerciale des centres-villes est un phénomène général auquel ne semblent échapper que les villes extrêmement touristiques, notamment en bord de mer. Elle est la conséquence d'un système global, d'un mode de développement économique auquel par ailleurs nous adhérons (ou pas)… On ne peut pas à la fois vanter les mérites de la libre entreprise, adhérer à un système qui repose sur la concurrence et la recherche du profit, et s'étonner que les petits magasins ne puissent résister à proximité des grandes surfaces. Quant aux consommateurs que nous sommes, nous ne pouvons pas à la fois faire nos achats au supermarché et sur internet et nous plaindre que les boutiques ferment au coin de la rue. Il faut savoir être cohérent.
L'alternative à ce modèle, c'est l'économie sociale et solidaire, une économie qui repose sur l'entraide, le partage et le bénévolat. Nous le voyons bien à Coye-la-Forêt : ce qui fait vivre le village, ce qui lui donne son exceptionnel dynamisme, c'est son réseau associatif. Et la boutique la plus dynamique qui soit se trouve en centre ville à l'enseigne du Vestiaire de Sofie. Il y a là une activité formidable, on entre, on sort, on passe dire bonjour, on apporte un paquet de vêtements et d'objets dont on n'a plus l'usage, on donne un coup de main, on achète une bricole…
Pour finir son mot sur le sujet François Deshayes affirme que nous prendrons le temps nécessaire afin d'appréhender tous les tenants et aboutissants de ce projet ainsi que ses conséquences induites. La phrase est un peu creuse : on se croirait à une conférence gesticulée de Franck Lepage.
Mais oui, commençons par voir si les six commerces nouvellement implantés sur les ruines de ceux qui les ont précédés, si ces nouveaux commerces dont nous n'avons pas nécessairement besoin, arrivent à tenir. Attendons de voir comment tourne la supérette. Il sera toujours temps, après, d'amplifier le mouvement, si c'est utile.
Dans l'immédiat, espérons, oui, que le temps nécessaire sera pris, que rien ne se fera de façon irréfléchie et précipitée, que la réflexion, la discussion permettront de regarder la réalité en face et en toute lucidité afin de prendre des décisions qui ne bouleversent pas l'équilibre et l'identité du village où nous avons choisi de vivre.
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3 commentaires
Commentaire de: Marie Louise Membre
Commentaire de: Durand Visiteur
Il faut prendre en compte l’ouverture prochaine du nouveau “lidl’ qui va plomber encore plus l’avenir de ces commerces,dont la seule clientèle sera les personnes âgées ne pouvant ou ne souhaitant pas utiliser leur voiture, cela sera t’il suffisant á leur permettre de vivre?
Commentaire de: Pierre Chasot Visiteur
je vous cite
Et surtout qu’il ne nous tienne pas pour responsables de leur éventuel échec. François Deshayes écrit : c’est aussi à chacun d’entre nous que revient la responsabilité de les faire travailler. Voilà bien une responsabilité qu’il nous faut refuser : nous n’allons pas nous mettre à consommer à tort et à travers juste pour que les commerces nouvellement implantés puissent demeurer à Coye.
en effet, dans notre foyer, nous ne pourrons nous permettre de nourrir tout le monde comme ça. et pour l’appoint nous avons décidé de rester fidèles à Monsieur Dady. il a travaillé dur et lui suggérer de perdre son indépendance pour ne pas mourrir est cynique.
puis je vous demander pourquoi vous n’écrivez rien dans la gazette locale où de ce fait il n y a qu une voix?
Je me permets quelques remarques. Je suis surprise de constater, en discutant avec des Coyens - ceux qui signent la pétition et ceux qui ne la signent pas - qu’un nombre important d’habitants ne sont pas au courant du projet immobilier de monsieur le maire dans l’ecole du Centre, ou n’en ont qu’une idée assez floue : “oui, j’en ai vaguement entendu parler, c’est à propos de l’école?". Cela n’a rien d’étonnant. Ils n’ont pas pu ou pas voulu assister aux réunions publiques, et internet, non, ils n’y touchent pas, ne visitent ni le site de la mairie ni coye29. Donc, que reste-t-il pour s’informer? La lettre de Coye. Or, quelles informations fournit-elle sur le projet? A peine une dizaine de petites lignes dans celle de septembre qui stigmatisent les informations erronées qui circuleraient en ville sur le sujet. Dans celle d’octobre, mention est faite d’une part d’ une pétition dont la municipalité n’aurait absolument pas tenu compte pour reporter “de quelques mois” le débat sur le projet en conseil municipal, d’autre part de la nécessité de prolonger la réflexion ( l’on ne peut que s’en rejouir). Mais pourquoi ne pas en avoir déjà informé les Coyens dans la lettre d’octobre, si la décision de ce report avait été prise fin août? Pourquoi ne pas dire en novembre à tous les Coyens ce qui a été dit au conseil municipal de septembre, que le projet serait débattu en février? Pourquoi se contenter d’ une formule vague? “Quelques mois"? Deux, trois, douze, vingt? Si l’on ne veut pas de “désinformation” il faut informer. Je pensais que, vu le nombre d’articles parus dans coye29, vu le nombre de pétitions signées, vu l’intervention en conseil d’une conseillère municipale d’opposition, annonçant le nombre de pétitions, je pensais que monsieur le maire aurait largement utilisé La Lettre de Coye du mois de novembre pour informer les Coyens, quitte à ajouter des feuillets supplémentaires, quitte à produire un numéro spécial!Soyons fous! Le sujet en vaut la peine, ce n’est pas tous les quatre matins que l’on pulvérise une école (ce n’est qu’une métaphore, rassurez-vous). Non. Rien! Indécision? Manque d’enthousiasme? Résistance dans les rangs? Complexité du projet? Incertitudes, inquiétudes quant aux “conséquences induites"? Réflexion sur “les tenants et les aboutissants", dit monsieur le maire ? Simplifions alors : les “tenants” nous les avons, une école au centre du village depuis 1930, autour de laquelle vont et viennent les habitants. “Les aboutissants", c’est facile aussi : des commerces, des parkings, des logements. Plus d’école. Finalement, c’est une question de choix. Et le choix plonge dans l’inquiétude. Je comprends vraiment que monsieur le maire soit inquiet.