Pourquoi pas une épicerie coopérative ?
Au sein de notre société existent de nombreux secteurs économiques obéissant, chacun, aux lois qui lui sont propres : secteurs marchand, associatif, coopératif, fonction publique, partenariat public-privé, petites et moyennes entreprises, secteur uberisé, auto-entreprises, professions libérales, etc. Les modèles sont multiples, chacun étant régi par une réglementation particulière. Le système marchand, dans un modèle d'économie libérale, obéit à un certain nombre de préceptes tels que "la concurrence libre et non faussée", "la loi de l'offre et la demande", ainsi que la réalisation de profits par des acteurs privés.
Nous avons à Coye-la-Forêt un très bel exemple d'économie entièrement associative, circulaire et solidaire avec le vestiaire de Sofie. Nous avons les services communaux et toutes sortes d'associations qui œuvrent dans des domaines très divers, créant de la richesse. Et puis il y a l'économie marchande : ce sont les commerces.
Je suis donc très étonnée, et pour tout dire assez choquée, de constater que depuis quelques temps de nombreux Coyens participent bénévolement au réapprovisionnement des rayons de la supérette. Non pas que je réprouve les gestes de solidarité, si c'est de cela qu'il s'agit – ils sont la preuve d'une grande générosité et à ce titre sont louables, bien évidemment – mais enfin le G20, pour autant que je sache, appartient au système marchand et je trouve anormal de travailler gratuitement pour un patron privé. Il y a un grand principe qui veut que "Tout travail mérite salaire". On comprend bien qu'en ces temps de confinement on a besoin de s'occuper et très spontanément les plus altruistes vont proposer leurs services. Il ne s'agit pas de les critiquer, bien sûr, ils font preuve de bonnes intentions. Mais ils sont nombreux aussi ceux qui recherchent un emploi, même un temps partiel, même pour quelques jours, parce que leur situation est spécialement difficile en ce moment.
Alors de deux choses l'une :
- soit la supérette est dans le secteur marchand, et elle emploie de la main d'œuvre salariée ;
- soit elle est dans le domaine associatif ce qui l'autorise à faire appel aux bonnes volontés, mais dans ce cas l'activité est à but non lucratif et les profits ne sont pas privatisés. Il faut être cohérent.
Et de deux choses l'une, à nouveau :
- soit le G20, depuis la crise sanitaire et "grâce à elle", voit la demande fortement augmenter, et le nombre de salariés employés jusqu'à présent n'est pas suffisant pour faire face à cet afflux de clients : dans ce cas, le patron doit embaucher du personnel supplémentaire, selon les règles dictées par le code du travail ;
- soit ce magasin ne peut pas faire face et il dépose le bilan.
C'est la règle, certes impitoyable, mais c'est la règle dans l'univers marchand du secteur privé. Au demeurant, les autres commerces alimentaires dans la Grande-Rue et sur le marché auraient tout lieu de se plaindre de cette concurrence déloyale.
Si la municipalité estime que ce commerce ne doit pas disparaître car il remplit des fonctions de service public (ce qui est le cas, d'une certaine façon), alors il doit être "communalisé", il doit devenir un bien commun. Le modèle marchand n'est pas une obligation, c'est un choix. Et dès lors que c'est le choix qui a été fait, les règles qui le régissent doivent être respectées. Il s'agit simplement d'être logique.
On aurait pu faire le choix – on peut encore – d'une épicerie coopérative et solidaire : dans ce cadre-là, oui il sera possible de faire appel aux bonnes volontés et il s'en trouvera de très nombreuses pour "faire tourner la boutique" qui, du coup, deviendra un lieu d'entraide et de rencontre, comme l'est le vestiaire de Sofie. Dans ce cadre non marchand, le bénévolat a toute sa place ; bien plus, les économies réalisées sur les dépenses de personnels et les marges bénéficiaires permettent de pratiquer des prix quasiment coûtants et d'offrir au plus grand nombre des produits de qualité à des prix très compétitifs.
Une épicerie coopérative et solidaire, c'est un autre modèle possible. Il faut savoir ce que l'on veut. Il faut choisir et tirer les conséquences de ses choix.
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2 commentaires
Commentaire de: francoise Membre
Commentaire de: Serge V. Visiteur
Madame,
La ville aurait gagné à vous avoir pour maire.
Vous avez entièrement raison et vous l’exprimez à merveille.
C’est très étonnant cette histoire de bénévolat au G20 !
En quoi l’état d’urgence sanitaire justifie-t-il qu’un commerce ait le droit de faire appel à de la main-d’œuvre gratuite ? Tous les commerces y ont-ils droit ? Et d’autres employeurs ? Comment cela se passe-t-il au niveau des assurances ? Cela va-t-il cesser avec la fin du confinement et reprendre à la prochaine crise ?