En ce temps-là, l’amour
De Gilles Segal
Mise en scène de Christophe Grand
Lundi 11 octobre
Tellement émue et affectée qu’il m’a fallu quelques jours avant que je puisse écrire ces lignes…
Le spectacle nous plonge dans un décor désuet. Seul en scène, avec comme accessoire principal un magnétophone, David Brécourt interprète extraordinairement bien le magnifique texte de Gilles Segal. Par moment nous entendons des bruits d’horloges, qui peuvent faire référence au temps qui passe, comme au titre de la pièce et aux sept jours dans ce train… Au loin, nous apercevons sur le bras du comédien un numéro, un numéro qui fait écho à son histoire personnelle, un numéro qui nous rappelle qu’en ce temps-là les Hommes n’étaient plus considérés comme des humains.
Une leçon de vie, de transmission et un récit poignant qui résonne comme un hymne à la vie, à l’amour !
Sept jours, c’est le temps qu’il aura fallu à un père pour faire vivre à son fils une vie entière.
« En ce temps-là, l'amour était de mentir aux enfants. » Voilà les premières paroles prononcées de ce récit poignant. Travestir la vérité quand elle devient hideuse !
La pièce démarre doucement, le grand-père a du mal à s’exprimer, du mal à poser des mots sur ce traumatisme gravé dans sa mémoire et pourtant, au fur et à mesure nous le voyons se transformer, se libérer… C’est lui qui nous transporte pendant sept jours dans ce train, dans ce train qui le conduisait, lui et les autres, à la mort.
Lors de cet épouvantable voyage, il fait la rencontre d’un drôle d’homme et de son fils. A ses yeux l’homme incarne la folie, car il parle à son fils de choses totalement absurdes ; il lui demande s’il a bien fait ses devoirs pour le lendemain, or il sait pertinemment que demain ou après-demain ou dans trois jours il ne retournera jamais à l’école. Il sait que ce sont sans doute ses derniers jours de vie. Il décide alors lui faire vivre une vie merveilleuse, de lui faire vivre la vie qu’il aurait eue s’il n’avait pas été juif et de lui transmettre les connaissances qui feront de lui un homme en seulement six jours. Sept jours, comme la création du monde…mais cette fois à l’envers !
D’abord perplexe, le grand-père devient admiratif envers ce père aimant et protecteur.
Tout s’enchaine, nous ressentons de plus en plus le chaos dans ce wagon, du bruit, beaucoup de bruit, des cris, de la peur… Mais le père a une imagination débordante et ne laisse rien paraître de sa douleur sur son visage, de son effroi car il sait qu’une fois arrivés, ils vont mourir.
Au bout de quelques jours, on ne sait plus très bien qui du père ou du fils protège l’autre.
Nous voyons à quel point le grand-père est traumatisé par cette horreur, il n’arrive pas toujours à finir ses phrases et il y a un certain mot qu’il ne prononce jamais, seulement à la fin de la pièce nous l’entendons dire : Auschwitz.
Ce témoignage ne tombe jamais dans le pathos et on rit parfois, mais avec une certaine culpabilité.
Si la pièce aborde la shoah, thème cher à Gilles Segal, c’est surtout de transmission et d’amour dont il s’agit. Le devoir est essentiel pour que les générations futures n’oublient jamais.
Lien vers la galerie photo : En ce temps-là, l’amour De Gilles Segal
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