LA SORCIÈRE LATROUILLE
De et avec Frédérique Bassez
Coproduction Apremont Musithéa et Théâtral Ouest
Mise en scène : Patrick Wessel
Une histoire de sorcière, c'est bien, cela permet d'avoir peur. Et c'est encore mieux quand on est rassuré et que l'on sort du théâtre en riant.
Installé dans son fauteuil, impatient, inquiet ou ravi, le jeune spectateur est mis en confiance, car le décor qu'il découvre est celui d'une chambre de fille, toute rose et jolie. Il rit déjà en voyant remuer et sortir de la couette les doigts de pied de celle qui doit se réveiller pour ses activités de la journée. Et bientôt le tic-tac sonore d'une horloge annonce le matin et le début de l'aventure.
On va donc vivre la journée d'une fille de sorcière qui ressemble un peu à la journée de bien des enfants. D'abord, la séance de gymnastique, le petit déjeuner, l'habillage. Tout est harmonieux et riant. La jeune Latrouille se délecte de vers de terre séchés - pour avoir de belles crottes de nez - et de sirop de limace, elle s'habille d'une robe de princesse. Mais les ennuis arrivent. D'abord c'est Spider, une vilaine araignée qui ricane, en voix off, et se moque de la petite fille « qui a peur de tout, même des enfants. » Et puis, des pas menaçants dans un escalier, qui résonnent et font frémir. C'est la Mère sorcière, si redoutée que l'enfant cache les trésors de sa chambre à son approche, et qui doit être si effroyable qu'on ne la montre pas. Nous ne verrons que sa bouche projetée sur écran, lèvres rouges qui s'ouvrent comme celle d'un carnassier.
Les deux forces sont là. L'autorité, la laideur, la méchanceté, le noir (une sorcière s'habille de noir, on le sait !), et le rose tendre, la grâce, la musique, la robe de princesse, l'amour. Qui l'emporte ? L'amour bien sûr, la poésie, le rêve qui auront raison de la laideur du monde. Et la créativité de la mise en scène relègue le monde obscur derrière le rideau - le laid existe mais on ne le montre pas, sans doute pour ne pas lui donner trop de pouvoir - sollicite l'imagination : on ne voit pas les sorciers, ni l'affreuse mère. La paix du monde est juste suggérée par le vol de papillons sur un rideau de ciel.
N'oublions pas le rire. Pour que l'oiseau entre dans la cage, il faut, dit Prévert, « quelque chose de gai ». Et Frédérique Bassez, l'auteure de la pièce - et comédienne - a réuni tous les ingrédients pour égayer, le mouvement, la danse, la musique, les mimiques et la fabrication de potions extraordinaires cuisinées sur une véritable cuisinière dont les flammes lèchent la marmite. On y met du pipi de moustique, des crottes de nez de limace. Succès garanti ! Les rires sont là. Trois enfants assistent l'apprentie sorcière dans la fabrication des mixtures, vont chercher les bocaux dans le placard, versent les ingrédients dans la marmite, aident à attraper la queue de la souris, la patte de l'araignée.
La réussite du spectacle est totale, car la comédienne à elle seule remplit l'espace avec générosité. Sa pratique de la danse donne grâce et force à tous les déplacements et chaque mouvement est large, chargé de sens. Elle sollicite les enfants et garde une parfaite maîtrise : quand il le faut, le silence reprend ses droits pour que le conte se poursuive. A la sortie, les enfants sont encore tout à leur émotion. L'un d'eux rassure son voisin : « Les sorcières, ça n'existe plus maintenant », et les enseignants ne cachent pas leur satisfaction pour cet excellent spectacle où l'enfance est traitée avec justesse, sans mièvrerie ni facilité.
PARTAGER |
j’ai accompagné mes petits enfants à ce spectacle. Ils parlent souvent de la sorcière Latrouille, ma petite fille a été conquise dés son entrée dans la salle, ou juste les pieds de la comédienne apparaissaient… elle a apprécié l’histoire et est tombé sous le charme de la comédienne… Mon petit fils lui prépare maintenant des potions magiques….
Bravo à Frédérique Bassez.