On est tous des handicapés!
Il y a des mots valises, des mots tellement lourds qu’ils sont insupportables. Il est question de reprendre les définitions des mots handicap et handicapé.e pour soulager un peu de leurs poids ceux et celles qui les portent ? L’association « Droit Pluriel » nous soumet ce challenge, plus ardu qu’il ne paraît. Le mot handicap date du début du 20ème siècle, mais son usage médico-social a proliféré après les années 70. Il a permis d’étiqueter, de répertorier et surtout d’évaluer l’incapacité individuelle à servir pleinement la société, comme il se doit pour un.e citoyen.ne à part entière.
Parce que voilà ! Nous, les handicapé.e.s, on a une vie cassée, en morceaux disparates mal recollés. Il n’y a que des bouts qui fonctionnent. Les autres bouts sont les handicaps, les incapacités, des impossibilités, les bizarreries, tout ce qui parasite le « vivre-ensemble ». Tiens, un autre gros mot-valise ! Dedans, on entasse allègrement des tas de sens et de contre-sens. Ça voudrait dire qu’on est bien entre nous, en société, tranquille avec les autres, sans histoire, sans se poser de problème, à égalité entre les personnes. Donc celles et ceux qui posent des problèmes, c’est nous, les handicapé.e.s. Être ainsi distingué.e.s nous expose aux regards gênés, au mépris paternaliste suffisant, aux apostrophes blessantes, aux injures agressives, jusqu’aux violences avilissantes et terrifiantes. La société est normative. Elle nous montre au doigt ! (Sauf les manchot.te.s ça va de soi.) A un bout, il y a les super-zintégrés. Ils sont hommes, blancs, riches ou presque, hétérosexuels et cis-genre. C’est les champions, les héros, les forts, ceux qu’on pleure quand ils sont morts. A l’autre bout, il y a nous, les zandicapé.e.s, une cour des miracles qu’on n’ose pas regarder, les pestiférés. Et entre, il y a le grand nombre, la normalité. Foutaises ! Ça n’existe pas les gens normaux. Nous sommes toutes égales, tous égaux, mais tou.te.s différent.e.s. Il n’y a ni bons, ni mauvais sujets, mais que des spéciaux. Ces différences sont à accepter par l’ensemble de la société pour ne pas fabriquer les handicaps. A nous tou.te.s, de faire l’effort vers les autres, les « pas comme nous ». Alors la société ne sera pas « inclusive » (encore une grosse valise !), elle sera différente, ouverte, tolérante. Il n’y aura plus d’handicapé.e.s, il n’y aura que des gens aux différentiels plus ou moins importants, des gens plus ou moins en danger d’isolement. C’est grâce au chemin que nous ferons vers cet autre, éloigné par son différentiel plus ou moins élevé, que la société deviendra riche et aboutie. « La Liberté, c’est la différence. » Disait Milos Kundera.
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