D’après William Shakespeare
Adaptation et mise en scène : Antoine Herbez
Il est toujours bon de donner ses impressions à chaud après avoir vu un spectacle. Surtout un spectacle qui fait du bien, qui redonne le goût du vrai, du beau, du sensuel, d’où l’on ressort ragaillardi et joyeux.
Nul besoin de grands mots, de phrases alambiquées pour décrire ce que l’on voit quand ce que l’on voit sur scène nous entraîne dans une ronde infernale qui ne s’arrête qu’à la fin du spectacle.
Dans son adaptation du « Songe d’une nuit d’été » de William Shakespeare, parfaitement réglée, Antoine Herbez, le metteur en scène, a su à tout moment insuffler la poésie qui se dégage avec délicatesse du récit qui nous est fait.
La pièce se regarde comme dans un rêve. Les bois sont le cadre parfait pour les événements surnaturels qui s’y déroulent avec des moments privilégiés quand certaines herbes et certaines fleurs cueillies la nuit possèdent des vertus magiques comme celles qu’inspirent des rêves amoureux. Je persiste à croire que la folie amoureuse est un thème essentiel du « Songe d’une nuit d’été ».
Texte et mise en scène de Philippe Chuyen
Les « Pieds Tanqués » est une pièce optimiste qui démontre que le « vivre ensemble » devient possible dès que l’on se parle vraiment…
Pour quelqu’un qui était trop jeune à l’époque et qui n’a pas été directement touchée par les « événements d’Algérie », cette pièce fait comprendre bien mieux qu’un article descriptif type « wikipédia » ce qu’a été cette guerre avec ses drames familiaux. On en a finalement très peu parlé, et cette pièce de théâtre répare une injustice…
D’après les derniers entretiens de Louis-Ferdinand Céline
Mise en scène de Gérard Bénech
Avec Stanislas de la Tousche
Si Céline pouvait se réveiller …
Ah, Monsieur Destouches, Louis-Ferdinand, comme vous nous avez surpris ! Comme vous nous avez fait voyager dans vos souvenirs tout au long de la nuit !
Enfermé dans votre ermitage de Meudon, bien gardé par vos chiens aboyant à la moindre intrusion dans votre intimité, bercé par la musique lointaine au service des entrechats des jeunes élèves de votre compagne, évoluant au-dessus de votre tête, sirotant votre thé bouillant au fond d’une chaise qu’il vous coûtait parfois de quitter, vous nous avez fait, de votre voix chevrotante de vieillard désabusé et décati, bien des confidences !
Nous avons été amusés, choqués, fascinés par la théâtralité de votre personnage.
De Samuel Gallet
Mise en scène et dramaturgie du Collectif Eskandar
Vous écouteriez ce discours :
« Il fait sombre… la terre tremble sous mes pas… Il y a un violent incendie… Je suis angoissée… soudain, autour de moi, les murs s’écroulent… toute la ville est en feu… elle s’appelle Eskandar… il se produit une terrible catastrophe : le pays n’est que destructions… Dans ses ruines, je vois de grands animaux… des éléphants… des cerfs… des lions géants… qui se promènent en liberté… Ils se sont échappés du zoo… Un lion féroce dévore un homme… Il y a du sang partout… Mais maintenant, je m’appelle Madame de F… oui, un nom à particule…et mon jeune fils armé d’un couteau est avec moi. J’ai un fusil… je tire sur les lions… je vise tout ce qui me fait peur… »
Vous pourriez alors vous imaginer dans la peau d’un psychanalyste, mais ce n’est pas le cas ! Vous êtes un spectateur de théâtre. La femme qui parle n’est pas étendue sur un divan, elle se trouve sur la scène côté cour, accablée sur une chaise. Son état et son discours sont décrits, repris, commentés, complétés par un récitant debout derrière un micro au centre d’un dispositif en demi-cercle formé au jardin par un long instrumentarium varié, avec le percussionniste qui lui est attaché, et, à la cour, par une violoncelliste assise derrière son violoncelle et un clavier.
De Samuel Gallet
Mise en scène et dramaturgie du Collectif Eskandar
Très tristounet, ton article, Jacques ; comment se fait-il que tu n'aies pas été transporté comme nous dans cette histoire fabuleuse ?
J'ai été prise d'emblée : quelle talentueuse comédienne, cette petite bonne femme qui ne paie pas de mine, et qui joue ça, ce n'est même pas du désespoir – c'est relativement plus facile à jouer le désespoir – mais ce manque d'espoir, cet enfermement dans la solitude et le désarroi, quand on vient l'expulser d'entre ses quatre murs où elle est recluse avec son fils de sept ou huit ans, quand il n'y a plus rien à attendre de personne, quand il n'y a rien à espérer et qu'il ne reste plus qu'une seule chose à souhaiter, c'est une catastrophe, une vraie grande catastrophe, quelque chose d'extraordinaire, de grandiose : j'ai cru d'emblée à ce désir de cataclysme.
Non, on n'est pas chez le psychanalyste, à ressasser ses petits tourments personnels ; on est carrément chez les fous, dans le grand délire onirique, et la petite bonne femme y croit tellement que le phantasme devient réalité, son rêve éveillé devient poème lyrique quand le comédien prend le relais, et que la musique, percussions et violoncelle, s'en mêlent, le rêve éveillé pour nous devient conte fantastique, et la magie des mots, leur scansion, l'énumération poétique de tous les animaux échappés du zoo, on y croit, on les rêve, on les voit.
De Jean Racine
Compagnie Minuit44
Mise scène : Laurent Domingos
Il y a le théâtre contemporain, selon les jours, drôle, provocateur, poétique, onirique, émouvant, bouleversant parfois, en prise avec les réalités de notre temps, et les auteurs classiques – les grands tragiques de l'Antiquité, Shakespeare, Racine, Schiller… – auxquels il faut revenir régulièrement car ils sont – osons les superlatifs – immenses et éternels.
Racine, donc et plus précisément Britannicus dont l'auteur lui-même avoue que c'est celle de ses tragédies qu'il a "le plus travaillée" (seconde préface - 1676). Elle nous était proposée mardi dans une très belle mise en scène, de Laurent Domingos.
Nous assistons à la naissance politique de Néron, qui aux yeux de l'Histoire, apparaîtra comme la figure même du tyran démoniaque et tortionnaire. Pour l'instant, il est encore complètement sous l'emprise de sa mère, Agrippine, qui entretient avec lui une relation de domination incestueuse dont il essaie de se dégager mais, soumis à des influences contradictoires, il est balloté d'un côté de l'autre, vacillant, indécis, girouette ne sachant à quel conseiller se vouer. Cette faiblesse actuelle explique peut-être son excès de cruauté future. "Las de se faire aimer, il veut se faire craindre", dit de lui Agrippine dès le début de la pièce.
Car dans ce palais, nous le verrons, le sentiment le plus répandu, c'est la peur, la peur qu'il faut entretenir parce que c'est un des plus puissants instrumenst de domination. Agrippine en a parfaitement conscience qui ajoute plus loin : "Je le craindrais bientôt s'il ne me craignait plus".
De Jean Racine
Compagnie Minuit44
Mise scène : Laurent Domingos
Domination, Oppression, Manipulation, Passion, Perversion, Poison voilà les composantes de « Britannicus », tragédie politique de Jean Racine, lesquelles entrent en parfaite communion avec Imagination, Diction, Exception, Perfection, Versification dans l’interprétation de l’équipe dirigée avec brio par Laurent Domingos.
Néron, fils d’Agrippine a succédé à son père l’empereur Claude. Celui-ci a eu d’un précédent mariage, Britannicus promis à Junie. Dominé par Agrippine, subitement amoureux de Junie, manipulé par son gouverneur Narcisse, Néron assassine son demi-frère.
Texte et mise en scène : Marine Bachelot N’Guyen
Sylvain, un immigré congolais muni de faux papiers, et Karine, une femme blanche caissière de supermarché, tombent amoureux. Karine a un rapport fusionnel avec son chien labrador Sherkan. Ils vivent tous les trois dans un petit studio, mais la cohabitation se révèle difficile, chacun éprouvant beaucoup de difficultés à trouver sa place.
Plusieurs thèmes sont abordés :
- les rapports de domination : le chien par l’homme, la femme par son partenaire masculin et son employeur, l’homme noir par l’ancienne puissance coloniale ;
- l’insuffisance des mots pour communiquer réellement dans un couple ;
- le rapport du monde occidental à l’animal domestique.
Écriture et mise en scène : Olivier Lopez
Avec Marie-Laure Baudain, Alexandre Chatelin, Laura Deforge et Adélaïde Langlois.
Samedi soir, j'ai vu quatre clowns très en verve nous faire découvrir à leur manière le monde le plus fermé et hermétique de la planète, qui vit depuis des décennies sous le régime le plus totalitaire et militaire qui soit : la Corée du Nord. Cela, au point de nous faire exploser de rire des situations les plus terribles qu'il soit de vivre encore aujourd'hui !
Avec quelle force ils nous ont restitué le culte de la personnalité, la propagande écrasante de ce régime militaire et policier ! Qui peut imaginer le ballet des missiles, le culte des tyrans, le manque et les privations de tout, la méfiance des rapports avec les voisins et les proches, comme ils nous l'ont joué samedi soir ? Les symboles sont détournés, ridiculisés – missiles en carton, drapeau/guenille – pour ne pas faire pleurer de l'horreur de ce qui se vit au quotidien aujourd'hui dans ce pays qui pourrait être si doux et beau.
de Dario Fo
Théâtre de La Lucarne
Mise en scène : Isabelle Domenech
Déjanté, farfelu, loufoque...ça fuse, ça bouge, ça décoiffe avec des comédiens qui "se la jouent" à fond, à plein, sans limite...
Oui il s'agit bien d'une comédie, d'une farce mais, sans plus attendre, voilà qu'affleure l'émotion, la conviction. Sous le rire, la rage? Commedia dell'arte à la sauce des années de plomb dans cette Italie qui hésite entre prospérité et révolte, entre faiblesse politique et puissance économique...farce et tragédie.
Superbe prestation de "notre" troupe qui oublie ses amateurismes pour se saisir des personnages avec un naturel qui s'affirme dans la fluidité du texte, la liberté du mouvement. L’émotion surgit sans crier gare, déborde, envahit la scène pour bien vite battre en retraite devant le rire. À la "moulinette" de Dario Fo rien n'échappe : ni les patrons, ni les femmes, ni les institutions, ni la finance. Fo ose tout et le fantôme d'Aldo Moro est là pour rappeler l'Italie à ses démons, à ses faiblesses. L'Italie ? Pas sûr qu'elle soit seule dans cette galère !
Lecture théâtralisée
Par les compagnies Calliope et René Loyon.
En préambule au 38e festival théâtral et avec le soutien de la bibliothèque municipale, onze comédiennes et comédiens des compagnies Calliope et René Loyon nous ont offert un spectacle inédit au centre culturel ce dimanche 28 avril.
Une centaine de spectateurs étaient présents pour écouter ces comédiens interpréter une vingtaine de textes sur les migrants, celles et ceux qui quittent leur pays et leurs proches en quête d'un avenir meilleur... et sur le regard que nous posons sur eux.
Parmi ces textes, le poème de Prévert "Étranges étrangers" qui a donné son nom au titre du spectacle, et des extraits du recueil "Bienvenue ! 34 auteurs pour les réfugiés" écrit en 2015 en partenariat avec le HCR, suite au choc provoqué par les images d'un enfant syrien retrouvé mort échoué sur une plage.
Deux réunions publiques cette semaine à deux jours d'intervalle : mercredi 24 avril, la municipalité organisait une réunion d'information sur le thème de l'éclairage public et de la pollution lumineuse ; vendredi 26 avril, l'association Coye en transition conviait à une conférence sur la permaculture. Les problématiques environnementales sont visiblement à l'ordre du jour.
Malheureusement, assez peu de monde, mercredi, pour écouter François Deshayes annoncer officiellement la décision prise par le conseil municipal d'éteindre l'éclairage public sur tout le territoire communal entre minuit et six heures du matin, à partir du 1er juin prochain. La motivation n'est pas d'ordre économique, nous explique-t-il : en effet le remplacement depuis quelques années des anciens réverbères par des nouveaux de plus faible hauteur et à lampes électroluminescentes (led) a permis de réduire de moitié la consommation d'électricité. Donc l'extinction des feux dans le milieu de la nuit n'entraînera qu'une économie financière relativement marginale. Non, et notre maire insiste bien, sa motivation est tout autre : on ne va pas dire "écologique", car le mot visiblement est encore vilain, mais il s'agit bien, fondamentalement, de préservation de la biodiversité.